Llylewin se laissa docilement faire lorsqu’on lui étala une sorte de gel visqueux sur le ventre, pensant que maintenant elle avait autant de trucs dégoûtants dedans que dehors. Elle ne comprenait pas bien en quoi consistait la manœuvre vu que ce n’était pas ce qui se passait à l’intérieur de son bide qui la préoccupait, mais la façon de le faire passer plus rapidement à l’extérieur.

La vampire jeta un regard dédaigneux au bras du lycan : elle n’avait pas faim, elle ne voulait pas de son sang. Manger était une préoccupation très loin de son esprit, la perspective de lui arracher le bras pour se détendre la tentait beaucoup plus, c’est pourquoi elle le repoussa une énième fois :

Je ne vais pas m’amuser à te téter le poignet, utilises tes deux mains pour sortir ce truc et qu’on en finisse ! gémit-elle alors que l’alien se servait à nouveau de ses entrailles pour faire du macramé.
Je me fous que ça soit compliqué, ouvre-moi en deux, transforme toi en lycan pour bouffer ce foutu mioche, j’en sais rien, sois créatif, mais bouge-toi BORDEL ! commença-t-elle à s’impatienter, sentant ses forces s’échapper comme le mince filet d’eau d’une clepsydre, et le pire était qu’elle n’avait même pas l’envie ou l’énergie de tenter de se recharger, elle voulait juste que ça se termine, et ce d’une façon ou d’une autre, vu les souffrances que cela engendrait elle était prête à envisager toutes les options.

Milicent, si tu motives suffisamment ce monsieur dans son travail je t’offrirais la plus grosse prime de ta carrière, murmura-t-elle avant de s’affaisser un peu plus sur son matelas, tel une méduse échouée sur une plage.

Milie suivait les échanges entre la vampire et celui qui disait ne pas être un vampire, et qui visiblement était un lycan - ça au moins, elle connaissait - avec une perplexité grandissante. On lui avait déjà parlé des déconvenues du mariage mais là, l'exemple était des plus flagrants. Bon il fallait se l'avouer, sa patronne était loin de l'archétype de l'épouse modèle. Mariée et enceinte d'un autre, il n'y avait qu'elle pour pouvoir faire un coup pareil.

Malgré la situation qu'elle comprenait de moins en moins, elle ne pouvait s'empêcher d'éprouver une point de fierté à l'égard de Llyl qui savait au moins pimenter tout ce que Milie avait toujours trouvé particulièrement fade, se marier et avoir des enfants.

Elle suivit les instructions de Stasi, trottinant d'un point à l'autre pour brancher l'échomachintruc et hésitant quelques instants avant d'enduire le ventre de la patronne de cet espèce de gel gluant avec une grimace. Décidément, la soirée était pleine d'imprévues et si on lui avait dit qu'elle finirait par engluer sa patronne qui se laisserait faire les jambes écartés, elle aurait fait les yeux ronds. D'ailleurs, elle était un peu en train de faire cette tête.

"Enchantée monsieur Tarabi…Taba… euh Stasi ! C'est bien ça. Je dois vous féliciter pour le mariage ? Ou bien…"

Elle coula un regard en coin à la patronne dont la mauvaise humeur semblait augmenter à mesure que la douleur s'intensifiait. Une prime ? Mine de rien, elle ne perdait pas le nord et savait toujours trouver les bons mots qui faisaient mouche.

"Bon. Qu'est ce que je dois faire pour remplir mon rôle d'assistante et libérer l'alien ?"

Elle commençait presque à avoir pitié de Llyl à la voir échouée sur le matelas défoncé et elle espérait vaguement que son "mari" arriverait à la libérer rapidement. Et là, elle réalisa qu'après cette histoire, elles auraient un bébé braillard sur les bras. Et un bébé vampire.

Elle réprima un frisson avant de reporter son attention sur la scène. Etonnamment, elle n'avait peur ni de la vampire ni du lycan. La situation était trop surréaliste pour avoir peur de quoi que ce soit à part de ce qui allait sortir d'entre les jambes de Llyl.

Alors que le doc lui tendit son poignet, la vampire grommela, enfonça ses crocs dans ses veines et on put entendre un bruit de succions dans toute la chambre. Au bout de quelques minutes, quelques peu revigorée par cet apport de nourriture, la vampire reprit quelques couleurs, enfin façon de parler. Le doc put donc entreprendre de lui faire une péridurale, et après une heure d’intense travail le doc et son assistante d’un soir finirent de sortir le petit « monstre » du ventre du grand « monstre ». Grace au sang ingurgité, la vampire se régénéra assez rapidement. Et put récupérer sa progéniture…

Vous y avez cru ? Le doc lui n’avait même pas espéré que la situation se passe comme ça. Oui parce que ça femme avait un don pour compliquer les choses. Que ce soit conscient ou inconscient le doc savait pertinemment qu’il n’y avait aucune chance pour qu’elle améliore la situation.

C’est donc sans surprise qu’une deuxième fois, dans une grogne faiblarde, que la vampire refusa son offre. Le doc soupira, et commença à s’adresser à sa nouvelle assistante.

« Pas de félicitations pour le mariage je pense qu’on s’en passera, par contre je vais avoir besoin que tu ouvres ma deuxième mallette pour en sortir la grande seringue. Et aussi le flacon à coté… Celui où il y a marqué Sufentanil Sandoz. »

En disant cela le doc avait passé sa main libre dans le dos et en avait sorti une de ses deux lames argentée.

« Tu te souviens de ça ... Chérie… »

Il lui fit un petit sourire en jouant avec le poignard.

« Milicent, je pense qu’on va avoir besoin de draps aussi, ou de serviettes… De quoi éponger une grande quantité de sang… »

Alors qu’il continuait de discuter, d’un geste vif, le doc se fit une belle entaille au poignet. Il plaça alors son avant bras ensanglanté devant le nez de Llylewin, C’était une emmerdeuse, certes, mais avant tout une vampire, et le doc espérait titiller son coté « prédateur ».

« Si je te propose de manger avant, Llylewin ce n’est pas pour rien, si tu veux pas mourir une seconde fois, tu te tais, tu fais ce que je dis, et une fois que je vous ai sauvés tous le deux tu déverses ta haine sur moi, compris ! »

Le ton du doc était plus sec, car Stasi ne voulait pas que la situation s’attarde trop, le petit n’ayant pas de cœur en état de marche, il était difficile pour le lycan de savoir comment le bébé allait.

Quelques heures plus tard, Esténëa Dostel fit de nouveau son apparition au Quality Street. La jeune femme s’était rendue à la clinique privée de Galway, mais d’après la secrétaire, le médecin était en déplacement. Elle devrait donc y passer plus tard dans la journée pour faire le rendez-vous que lui avait imposé la maquerelle…

C’est alors que des exclamations la tirèrent de ses pensées. En haut, dans le bureau de Llylewin lui semblait-il, l’on cria ; bruit strident qui se fraya un chemin jusqu’à l’étage inférieure par l’escalier. Décidée à aller apprécier par elle-même de quoi il en retournait, Esténëa prit la direction de l’escalier.

Une fois à l’étage, la jeune artiste comprit rapidement, après avoir embrassé les lieux du regard, la raison de tout ce charivari. Au milieu d’un arc de cercle composé d’un homme et d’une femme, gisait, dans une mare de sang, la patronne de l’établissement. Assurément, cette dernière était en train d’accoucher.

Esténëa s’arrêta net devant ce spectacle, et, ne pouvant se contrôler, fit un pas en arrière. Sa main se plaqua juste à temps devant sa bouche, étouffant de justesse un petit cri d’effroi et de surprise. Elle eut juste le temps de déglutir légèrement, avant d’abaisser vivement sa main, de prendre une grande respiration, et, honteuse de sa réaction, de reprendre une expression stoïque. Voulant autant se prouver à elle-même qu’aux autres sa dignité et son assurance, elle se rengorgea, s’avança parmi le cercle, faisant fi de sa répulsion pour la scène qui s’offrait à sa vue.

Je peux sûrement vous aider, non ?

Être au bout du rouleau.

Une expression fort intéressante quand on prend le temps de s’y intéresser un peu : il suffit de visualiser un rouleau de parchemin ou de papier cadeau et de visualiser ce moment où, à force de déroulements successifs, la matière première vient à se tarir dans un don total qui sonne le glas de l’existence même du rouleau.

Dans ce cas précis, Llylewin avait l’impression d’être un rouleau de papier toilette, tant sa vie lui semblait être merdique, et en prime de devoir subir un supplice du même acabit que celui du tonneau des Danaïdes car elle avait l’impression qu’une fois arrivé au bout du bout, lorsqu’elle n’en pouvait tellement plus que la situation ne pouvait pas empirer, il lui tombait une nouvelle tuile sur le coin du museau.
C’était ça, elle était un rouleau de PQ vide condamnée à rouler à l’infini dans le néant.

Tel était l’état d’esprit de la vampire lorsqu’elle réalisa que si le lycan lui demandait expressément de boire un coup ce n’était pas pour son bien-être personnel ou par pure bonté d’âme, mais parce qu’il allait la saigner comme un goret et que pour que ça coule d’un côté, il fallait que ça soit approvisionné d’un autre.

Livide – encore un peu plus que ce qu’elle était déjà – elle se résigna la mort dans l’âme et le monstre dans le bide à mordre dans le bras de Stasi pour absorber son sang, car s’il y avait bien une chose qui lui disait encore moins que se faire éventrer était de mourir en se faisant éventrer.

Les crocs plantés sur la partie haute de l’avant-bras, les ongles plantés non loin dans la chair du médecin, la future maman prenait des forces à mesure que le fluide vital coulait dans sa gorge.

Aussi, lorsqu’une nouvelle personne fit son entrée dans la chambre elle avait repris assez de poil de la bête pour hurler :
Non mais c’est pas vrai ! Mon utérus c’est pas le Zombillenium, on ne vient pas faire un petit tour ici pour se marrer, passer la tête entre mes cuisses c’est encore payant, BORDEL !

La dame se sentait déjà assez humiliée pour supporter d’offrir le spectacle navrant de sa déchéance à une nouvelle paire d’yeux.

La scène sembla comme figée pendant quelques instants, Stasi attendait que Llyl lui morde le bras, Llyl attendait un miracle pour que sorte ce bébé et fissa et Milie attendait… euh à dire vrai, on ne sait pas trop ce qu'elle attendait mais elle avait décidé l'espace d'une seconde qu'attendre était peut-être la chose la plus intelligente qui lui restait à faire en cet instant précis.

Le doc finit par lui donner quelques ordres simples qu'elle arriverait à suivre même totalement larguée par les évènements qui se déroulaient sous ses yeux. Alors qu'elle fouinait dans la mallette pour attraper la seringue et le machin dont elle avait déjà oublié le nom, elle haussa un sourcil, perplexe.

"Hey ! Mais vous êtes mariés depuis longtemps ? Nan parce que le bébé… euh… ouais non en fait ça me regarde pas… c'est du quoi déjà vous m'avez dit ? Sufentamachintruc ! Ca y est, je l'ai !"

Elle brandit fièrement la seringue d'une main et le flacon de l'autre quand elle poussa un petit cri de surprise - ou de frayeur - en voyant le geste du doc. Les yeux écarquillés elle laissa bien évidemment tomber la seringue, sans dommages, et le flacon qui éclata en mille morceaux dans un bruit sourd sur le sol.

"Oh mince de mince de mince… je… vous en avez un autre hein rassurez-moi ? Ou alors c'était pas forcément super utile hein... dites... hem... des serviettes, je vais chercher des serviettes ! Vite ! Vite !"

Elle se précipita dehors, attrapant ça et là des serviettes sans cette fois chercher quoi était à qui, c'est dire si la situation devenait grave. Quand elle revint, elle remarqua la présence d'Esténëa et poussa un soupir de soulagement. Dieu merci, elle ne serait plus seule dans cette scène totalement surréaliste.

"Esté, contente de te voir ! Je peux t'appeler Esté au fait ? Ouais ? Super ! Et…"

Sa voix mourut quand son regard se porta sur ce qui se passait sur le lit de la patronne. A tout prendre, elle aurait préféré la voir s'envoyer en l'air avec la fanfare de l'école plutôt que de la voir sucer le sang du lycan qui se tenait face à elle.
Une fois de plus, elle resta bouche bée, les yeux écarquillés et même les cris de Llyl n'eurent que peu ou pas d'effet sur elle.

"Ok… euh… euh… on fait quoi maintenant ?"

Si elle s'écoutait, elle n'aurait fait qu'une chose, prendre ses jambes à son cou et fuir le plus loin possible. Malheureusement ses jambes semblaient avoir décidé d'un commun accord avec elles-mêmes qu'elles ne se déplaceraient pas. Visiblement, elles appréciaient le spectacle les coquines !

Mais Milie, un peu moins…

Le doc allait de surprise en surprise. Enfin il avait réussi à convaincre sa femme de prendre des forces. Dans un sens c’était encore une preuve de son état de faiblesse. C’était bien la première fois qu’elle acceptait une idée venant de lui.

Mais alors que la vampire était en train de retrouver ses forces, une série d’évènements se déroulèrent en l’espace de quelques secondes sans que le doc ait vraiment le temps de réagir.
D’abord la porte s’ouvrit et une autre fille entra dans la pièce. Sans doute alertée par les bruits elle se proposa de prêter main forte.
En y réfléchissant le doc n’avait pas tant à se plaindre, il se retrouvait affublé de deux ravissantes assistantes. Il ne connaissait pas un médecin qui ne lui aurait pas envié sa situation. Mais alors pourquoi le doc n’arrivait pas à en profiter, pourquoi était-il sur ses gardes ? Pourquoi était-il si méfiant ?

La réponse à ses interrogations lui fut apportée par un bruit de verre fracassé sur le plancher. Stasi regarda le flacon contenant le produit de la péridurale se briser et la solution se répandre à même le sol.

Il poussa un petit soupir. Bon au moins au vu des insultes et des hurlements de Llylewin, elle semblait avoir reprit des forces. C’était déjà un bon point.
Mais maintenant il allait devoir trouver un moyen d’accoucher la vampire.

Le doc se redressa et essuya le sang sur son avant-bras. Les deux trous fait par les canines commençaient déjà à se refermer.

« Bonsoir mademoiselle, effectivement vous allez pouvoir nous aider. »

Il récupéra sa malle et regarda les différentes flasques qu’il avait apportées dans sa mallette. Il en sélectionna une, puis deux puis trois…

« Llylewin, finissons-en au plus vite. Je comptais sortir le bébé par une incision, celui ci étant coincé, tu ne peux pas accoucher par les voix naturelles. Je n’ai plus de quoi te faire un péridurale, mais afin que tu souffre un minimum je propose de t’injecter un mélange qui va te mettre dans un état second. La douleur ne disparaitra pas totalement mais elle sera considérablement atténuée. »

Il se retourna vers ses deux charmantes assistantes.

« Le problème avec ce genre de cocktail, c’est que votre patronne sera shootée, et que je ne peux pas prévoir ses réactions durant l’opération. Vous allez donc m’aider à l’empêcher de trop bouger une fois que je lui aurais injecté mon petit mélange. »

La vampire se demandait pourquoi le lycan s’acharnait à utiliser ces mots compliqués qu’il savait pertinemment qu’elle ne comprendrait pas : voies naturelles, péridurale…

Elle avait bien intégré en revanche qu’il comptait l’ouvrir en deux et que pour lui faire passer la pilule il allait lui administrer de la drogue. En tant qu’ex cracoïnomane cela ne lui faisait pas du tout peur, elle craignait simplement que son passé de junky ne rendent les petites potions de Stasi complètement inefficaces sur son organisme habituée à absorber toutes sortes de saloperies.

De toute façon est-ce que j’ai le choix ? L’autre emmerdeur ne veut pas sortir et je ne compte pas le laisser me labourer le ventre ad vitae eternam, donc fais ce qu’il faut pour le virer de là ! Et si t’as un truc pour rendre ça moins pénible, vas-y, je t’en prie, mais charge bien la dose !

C'est vrai, après tout que pouvait un petit médicament pour humain contre les souffrances d'une immortelle? Quoi qu’il arrive elle morflait déjà tellement que se faire éventrer lui paraissait une perspective presque enviable, et alors que les deux girls s’approchaient d’elle pour la maintenir elle leur lança un regard mauvais, qui surmonté de sa gueule en vrac et de ses cheveux en bataille devait avoir l’air fichtrement convaincant :

Je vous préviens, vous avez intérêt à vous préparer, parce qu’une à chaque bras c’est un peu léger, niveau force brute il m’en faudrait une pour chaque doigt, orteils compris ! Alors dites-vous bien que ça serait sacrément dommage d’avoir survécu au massacre pour finir encastrée maintenant dans un mur, tenez-vous le pour dit !

Elle ne comptait pas leur faire peur, mais simplement leur faire part d’une certaine réalité : contre un vampire elles n’avaient déjà aucune chance, mais contre une vampire à moitié enceinte et droguée…
Ça serait au lycan de gérer tout ça, après tout c’était son idée !

La boulette de Milie semblait avoir plus de conséquences qu'elle l'aurait imaginé au premier abord. Il est vrai qu'elle avait imaginé que le doc était suréquipé et qu'il avait prévu le coup.
Mais hélas, trois fois hélas (encore une expression qu'elle avait noté dans son petit carnet et qu'elle s'était juré de caser un jour quelque part sans avoir réellement trouvé encore comment) elle s'était trompée et, alors qu'elle regardait le liquide carminé cesser de couler du bras du lycan, le regard presque aussi rond qu'un carrefour giratoire aux heures de pointe, elle devinait vaguement que là, si la patronne survivait elle allait devoir faire gaffe à ses miches.

D'ailleurs, parlant de la patronne, Milie avait pensé que si elle avait l'air moins raplapla, peut-être pas au point certes d'aller danser la rumba au milieu de la pièce avec la fameuse fanfare qui n'avait cessé de hanter son esprit à l'imagination sans la moindre limite, les évènements allaient s'accélérer.

Elle avait espéré voir le bébé sortir de là comme un bouchon de champagne et que l'affaire en serait restée là. Malheureusement, les choses n'étaient pas aussi simple et voilà que des humaines et un lycan devaient pactiser pour éventrer une vampire qui en plus était consentante… décidément ça virait vraiment au n'importe quoi !

Quand Stasi exposa son idée, elle laissa échapper un éclat de rire nerveux. Droguer la patronne et la maintenir immobile ? La manœuvre pouvait sembler habile à première vue pour qui ne connaissait pas Llyl, mais en réalité elle était totalement désespérée.
C'était comme demander à un arbrisseau de résister à un cyclone de niveau 6, comme dans le film qu'elle avait vu à la télé avant qu'un vampire balance sa collègue à travers la pièce et détruise la télé. D'ailleurs, l'évocation du téléfilm lui fit dresser un index alors qu'elle essayait de prendre la parole, l'air de rien, histoire de détendre l'atmosphère ou alors tout simplement parce que sa stupidité était vraiment infinie.

"Hey, tu vas l'appeler comment le gosse ? Nan parce que j'ai vu un film, le personnage principal s'appelait Alexis. C'était sympa comme nom ! C'était un strip-teaseur super canon qui sauvait le monde d'une tempête je sais pu trop où … ça irait bien dans le contexte non ? Et ça pourrait être Alexie si c'est une fille !"

Elle se tapota le nez soudainement pensive. Alexie lui rappelait vaguement quelque chose, comme si elle connaissait déjà une fille qui s'appelait comme ça. Ou alors elle avait lu ça dans un magazine quand elle attendait... mais qu'elle attendait quoi au juste ? Au bout de quelques secondes, elle leva les yeux, elle avait totalement oublié ses camarades et la situation et, au regard furieux de la patronne elle se demanda si finalement elle n'allait pas elle aussi émigrer au bout du monde.

La Suisse par exemple, il y avait du chocolat et il parait que la vie était plus agréable parce que défiscalisée. Bien évidemment, elle n'avait pas la moindre idée de ce qu'une vie défiscalisée pouvait lui apporter et s'il s'agissait bien de la Suisse mais après tout, avec un terme aussi classe, ça ne devait pas être mauvais non ?

"Hem… euh donc je prends le bras gauche si tu prends le bras droit Esté… Logique non ?"

Sans attendre ni demander son reste, elle se cala derrière la patronne, se retenant de glousser nerveusement. Avec une telle juxtaposition de femelles allongées sur un lit elles auraient certainement fait un tabac, même avec une patronne enceinte sur le point d'accoucher. Après tout il y a des cinglés partout. Attrapant le bras avec une force étonnante pour son petit gabarit, elle laissa tout de même échapper un "désolée d'avance patronne", envisageant vaguement l'idée qu'elle allait devoir finir par s'assoir sur elle pour être un minimum efficace.

Le doc était en train de se concentrer sur le dosage des différents produits afin qu’ils soient le plus efficace possible. Il regardait la quantité dont il disposait et tentait de se souvenir des différentes tentatives qu’il avait réalisé sur des vampires lorsqu’il était en clinique…
Le problème avec ces créatures, qui d’ailleurs était le même avec les lycan, c’était leurs incroyable capacité à guérir. Les blessures, les fractures, et les empoisonnements. Aussi le doc savait pertinemment qu’il n’aurait aucune difficulté à shooter Llylewin, tout le problème était le temps ou elle allait rester dans cet état second.

Imaginez-vous en train de rêver, de délirer, puis d’un coup vous réveillez à moitié éventré tenu par deux filles… Voilà ce que craignait le doc, un retour à la réalité des plus brutales. Non pas qu’il avait une quelconque empathie envers la vampire, mais il n’osait imaginait ce qu’elle ferait à ses deux girls avant de se remémorer avec exactitude ce qu’il se passait.

Les deux filles vinrent se placer contre la vampire. La scène, associé au lieu avait un petit quelque chose de sensuelle… Enfin si on oubliait qu’au milieu il y avait une vampire en train d’accoucher sur laquelle il devait pratiquer en toute urgence une césarienne…

Esténéa était assez silencieuse, elle se contenter d’obéir, sans doute impressionnée par la situation. Milicent elle était fidèle à elle même, on avait l’impression qu’elle n’était pas dans la même pièce qu’eux, commençant a demander le nom du futur bébé…
Stasi sourit l’espace d’une seconde amusé par l’allusion sur la tempête avant de reprendre son sérieux.

« Il est clair que te mettre dans un état second avec deux humaines dans la même pièce, mais te faire un césarienne sans anesthésie, toi une vampire en manque de sang, épuisée, avec deux magnifique humaines à coté est, je pense, tout aussi dangereux… Et puis si vraiment sa dégénère je serais la pour t’empêcher de les achever… »

Le doc sortit tous les outils nécessaires pour pratiquer la césarienne. Scalpel, ciseau, forceps…Qu’il posa consciencieusement sur une petite table. Il récupéra ensuite la seringue dans laquelle il avait fait le mélange.

«Vous êtes prêtes mesdemoiselles ? »

Il leurs fit un petit sourire, et injecta le produit dans l’avant bras de Llylewin. Il observa alors ses pupilles, dès que celles ci se dilateraient il commencerait l’opération. Le doc devrait faire le plus proprement et le plus rapidement possible, il ne savait pas exactement combien de temps les substances feraient leurs effets…

Alors qu’elle se tenait là, allongée sur son vieux bout de matelas défoncé à se faire maintenir par ses girls en attendant que son futur-ex mari lui injecte un cocktail suréquipé en drogues avant de l’éventrer pour lui sortir un bébé de père totalement inconnu du ventre, elle se demandait à quel moment elle avait perdu le contrôle de sa vie pour que ça devienne autant la loose.

Était-ce au moment où elle était devenue propriétaire de cet endroit maudit, ou bien était-ce cette nuit funeste où elle avait troqué son célibat contre quelques mois défiscalisés ? Elle n’en savait rien, mais la juxtaposition de tous ces évènements avait conditionné son destin jusqu’à cet instant précis, à croire qu’elle subissait une sorte de justice divine la punissant d’avoir mené la vie qu’elle avait vécu, et qu’à chaque fois qu’elle avait connu un pénis au sens biblique du terme cela était revenu à pactiser avec le diable…

Alors qu’elle commençait son bad-trip à jeun, le lycan lui injecta son cocktail explosif dans les veines, et le monde extérieur cessa petit à petit d’exister. Tout le décor autour d’elle se mit à fondre, comme s’il avait été vidé de toute substances et se dégonflait jusqu’à devenir tout raplapla comme dans la pub Perrier.

Soudain, une forme émergea de cette sorte de bouillie informe, un homme, un homme de petite taille à la peau claire et aux cheveux tous blancs, vêtu d’un costume trois-pièces immaculé et scintillant.

Toi ! s’exclama la vampire d’un air furieux. Elle ne savait pas pourquoi ni comment, mais elle savait qu’il s’agissait du père de son bébé. Une sorte de certitude indéboulonnable dans ses entrailles lui disait que c’était lui, le pelé, le galeux dont venait tout le mal, le porteur des spermatozoïdes bioniques ! Bien qu’elle ne se souvienne pas avoir un jour copulé avec un nain albinos, elle en était certaine.

La vampire se releva. Elle n’était plus enceinte et semblait ne l’avoir jamais été, dotée de son tour de taille de jeune fille et vêtue d’une jolie robe à l’étoffe carminée, et se lança à la poursuite de l’homme en blanc avec la ferme intention de lui rompre le cou après lui avoir arraché les testicules avec les dents. Le malotru, visiblement décidé à ne pas se laisser rattraper se mit à courir, et elle le poursuivit un long moment à travers ce décor étrangement fondu.

Le bougre était rapide et elle finit par le perdre de vue. Pestant contre le sort, Llylewin s’assit par terre pour reprendre des forces, c’est qu’elle courrait depuis un certain temps… Lorsqu’elle remarqua à sa droite, au loin, un monticule qui se détachait de ce décor désertique. Perdue dans ce monde qui ne ressemblait à rien, elle décida de s’y rendre, se disant que sa proie se cachait probablement derrière.

Au fur et à mesure qu’elle se rapprochait, elle entendait une sorte de clameur et voyait des formes bouger autour de ce monticule… Lorsqu’elle fut assez près, elle vit alors la scène la plus bizarre de son existence, et Dieu savait que grâce à 300 ans d’exercice en tant que travailleuse du sexe, elle en avait vu, des choses bizarres!

Au sommet de ce monticule était planté un petit arbrisseau tout frêle sur lequel s’appuyait un dodo (Oui, parce que Llylewin était assez vieille pour avoir coexisté avec cette espèce) fumant la pipe tout en chantant une chanson dénuée de sens :
« Avant arrière dessous dessus, pour nous réchauffer faisons la course saugrenue, un pas de côté pliez sautez courrez dansez, quand on a fini il n’y plus qu’à recommencer – très rigolo en haut en bas en bas en haut, commencez demain on finira hier matin …»

Elle avait beau retourner les paroles dans tous les sens, elle ne réussissait à en trouver le sens et finit par arriver à la conclusion que le dodo devait être atteint d’alexie ou de toute autre trouble cognitif affectant son sens de l’élocution.
Le pire dans l’histoire était qu’une nuée de petits animaux – écureuils, poissons, étoiles de mers, pélicans – tous habillés tournaient en sens giratoire autour du monticule en gesticulant sur cette incompréhensible mélopée en une danse qui pouvait vaguement rappeler ce que donnerait la rumba avec 3g d’alcool dans chaque pied.

Se demandant ce que foutaient ces bestioles en plein milieu de son QS, elle s’avança vers leur leader et lui demanda :
Excusez-moi, mais qu’est ce que c’est que ça ? C’est quoi le but de la manœuvre ?

Le dodo s’arrêta un instant, interloqué par cette intruse qui venait l’interrompre, et répondit d’une voix claire teintée d’un léger accent british :
C’est la course saugrenue madame, c’est pour se sécher !
Se sécher ? Pourquoi, vous êtes mouillés ? Pourquoi vous ne retirez pas vos vêtements plutôt ?
Parce que nous sommes des animaux madame, pas des strip-teaseurs ! Et si vous ne souhaitez pas vous joindre à nous merci de cesser de nous perturber ! répondit-il sur un ton sec alors que les autres animaux commençaient à la regarder d’un drôle d’air.

Sentant qu’elle avait atteint les limites de la conversation – après tout, à quoi s’attendait-elle en parlant avec un dodo ? – elle décida de ne pas trop s’attarder et lui demanda :
D’accord d’accord, je m’en vais… Vous n’auriez pas vu un type en blanc par hasard ?

Le dodo porta à nouveau sa pipe au bec avant de répondre :
Si, il est parti par là, fit-il en désignant une direction au loin. La vampire s’éclipsa donc dans cette direction, laissant les animaux retourner à leur gigue.

Indications HRP:

Rapidement le doc eut la certitude que les psychotropes faisaient leurs effets. Ses yeux se dilataient certes, mais surtout la vampire commença à sortir un flot continue de mots, de paroles qui n’avaient pas réellement de sens.
Le doc devait donc faire vite, car il ne savait pas combien de temps le petit mélange qu’il avait injecté ferait effet. Rapidement il nettoya la zone qu’il allait ouvrir proche du pubis qui était suffisamment rasé pour ne nécessiter aucune préparation à l’avance, quand l’agréable devenait utile… Il vida donc une quantité non négligeable de Bétadine, et avec le scalpel commença l’incision.

La césarienne était une opération courante que le russe avait l’habitude de pratiquer. Cependant, les conditions n’étaient pas optimum et entre le fait qu’il ne savait pas si la vessie était pleine et donc prendre bien plus de précaution pour ne pas la toucher, que la vampire risquait de bouger malgré les deux demoiselles qui tentait de la bloquer, et enfin qu’il devait avoir tout au plus 20 minutes pour réaliser toute l’opération, le terme anodin n’était plus réellement d’actualité.

Le doc se concentra donc sur son incision. Il enfonça le scalpel coupant d’abord la peau puis les muscles de la paroi abdominale. La vampire commença à s’agiter, sans doute la douleur associée au délire, et le doc sentit que les filles commençaient à lutter pour la maintenir. Il devait donc se dépêcher.
Chose peu évident car bien entendu Llylewin commençait à saigner abondamment, et le seul moyen qu’il avait pour absorber cette grande quantité de sang était d’éponger avec une serviette. C’est donc avec peu de visibilité et l’image de l’échographe portable en tête que le lycan continuait d’enfoncer son scalpel dans cet amas de chair sanguinolent espérant ne toucher ni le bébé ni la vessie de la vampire.

Stasi fit une pose et plongea sa main dans l’ouverture afin de tenter de mieux s’orienter grâce au toucher. Il sourit satisfait, alors qu’il constatait qu’il était effectivement venu à bout de la ceinture musculaire abdominale sans pour autant provoquer d’autres dommages.

Mais sa victoire fut de courte durée, car à peine s’était-il retourné pour prendre de nouveau son scalpel qu’il sentit un choc violent et fut projeté en arrière. Sous l’effet des psychotropes, Llylewin venait de projeter la pauvre Esténea qui sans réellement le vouloir se servit du russe comme piste d’atterrissage !

Certes il y avait plus désagréable comme collision, le doc devait bien l’admettre, mais ce n’était malheureusement pas le moment pour en profiter, car maintenant que la vampire avait une main libre, elle l’agitait dans tout les sens devant le regard plus qu’inquiet de Milicent.
Le doc se redressa rapidement afin de plaquer de nouveau la vampire mais, trop tard malheureusement, Llylewin assaini une gifle monumentale à la pauvre girls qui n’avait rien demandée. Stasi eu mal pour la jeune fille et bloqua le bras de la vampire le temps qu’Esténéa revienne se mettre de nouveau en position.
Une fois les choses de nouveau en ordre, Stasi reprit son scalpel et commença à s’attaquer à l’utérus. Après quelques insultent en russe, il finit par franchir la dernière barrière sans faire trop de dégâts.

Le doc plongea alors ses mains dans le corps de la vampire et doucement il commença à en sortir le nouveau né. Difficile de voir la petite créature comme mignonne, car plein de sang et de placenta, les yeux fermé, bleu, le bébé avait tout du petit monstre.

Chose peu évidente pour le lycan, mais le bébé était-il vivant ? Enfin vivant façon de parler, car officiellement il était mort… Stasi lui donna une violente tape sur les fesses, technique habituelle pour le faire respirer, se demandant ce qu’il allait se passer. Le petit monstre ne respira pas mais il se mit à hurler. Le doc sourit, puis coupa le cordon ombilical et donna le nouveau né à Milicent.

« Lave le et enroule le dans un linge, je dois finir mon opération rapidement. Esténéa, essaye de te mettre à califourchon sur Llylewin pour lui bloquer les deux bras. »

La vampire commençait à se calmer, ce qui signifiait que les effets des psychotropes s’estompaient. Aussi il se devait de retirer le placenta et la refermer assez rapidement, sinon le réveil serait rude, et le lycanthrope ne donnait pas chère de la peau de ses deux jolies assistantes.

Milie avait bien saisi que cet accouchement ne serait pas une partie de plaisir, mais là, ça dépassait toutes ses craintes les plus folles. Seul point positif, l'afflux de sang ne lui faisait par tourner de l'œil, c'était une bonne chose à savoir pour plus tard, en espérant qu'il n'y aurait justement jamais de plus tard…

Le Doc semblait avoir les choses bien en main malgré la situation totalement surréaliste et la patronne qui avait sombré dans un monde étrange et coloré. Tout semblait effectivement aller comme sur des roulettes, Milie se sentant presque forte à l'idée qu'elles arrivaient à elles deux, plus une quantité non négligeables de substances aussi étranges que variées, à maintenir la patronne en place. C'est alors qu'Esté se mit à voler et, avant qu'elle ne puisse sortir une remarque fine, spirituelle et surtout totalement hors de propos dont elle avait le secret, Llyl lui asséna une baffe magistrale qui la fit taire en plus de lui casser le nez.

"Ah la vache ça fait mal, qu'est ce que ça fait mal AAAaaaaaah !"

Attrapant son nez à deux mains elle poussa un autre cri de douleur lorsqu'elle toucha l'appendice, oubliant un instant où elle était avant de s'en rappeler juste à temps et d'éviter une autre gifle ou pire encore. Le nez ruisselant, elle continua néanmoins de s'appuyer de tout son poids sur la patronne, essayant de ne pas regarder ce que faisait le Doc avec des yeux de merlan frit, ce qui n'était pas gagné non plus.

Finalement le russe, après avoir fait preuve d'une imagination sans limite en matière d'insultes, finit par plonger les mains dans le ventre de Llyl dans un bruit gluant et visqueux que Milie n'oublierait pas de sitôt. Il lui fallut quelques secondes avant de comprendre que Stasi lui tendait le bébé et elle l'attrapa avec une moue vaguement dégoûtée.

"D'accord, de bais le laber…" Un bref coup d'œil à l'entrejambe du bébé qui ne semblait pas avoir envie d'ouvrir les yeux et elle reprit après avoir prit une grande inspiration par la bouche. "La laber en fait."

Elle se releva, faisant preuve d'une adresse peu commune avec deux bras occupés et se dirigea vers l'énorme casserole qu'elle avait ramené. Manque de bol, l'eau était toujours aussi chaude et, à moins de vouloir faire cuire le bébé il faudrait qu'elle aille jusqu'à la salle de bains, ce qu'elle entreprit de faire aussitôt, respirant bruyamment par la bouche et essayant d'éviter d'avaler trop de sang, sans grand succès.

Elle allait mourir étouffée par son propre sang en tenant un bébé vampire dans les bras alors qu'elle avait survécu à l'accouchement d'une maquerelle vampire pratiquée par un lycan… il y avait une telle ironie dans cette idée qu'elle déposa le bébé dans le lavabo et essaya d'évacuer le trop plein de sang grâce à la serviette qu'elle destinait d'abord au gremlins. La voyant maculée de sang, elle grimaça avant de fouiller sans succès pour en trouver une autre.

Et bien la robe de chambre en soie ferait l'affaire, elle n'aurait jamais l'énergie d'aller fouiner ailleurs pour trouver autre chose de toute façon. Elle essaya tant bien que mal de l'emmailloter, avec un succès tout relatif et c'est un bébé avec une longue traine de soie qui se nichait dans ses bras lorsqu'elle revint dans la chambre.

"Et boilàààà ! Elle doude propre ! D'est norbal qu'elle redpire bas ? Et D'est doujours bleu un bébé ?"

La vampire était toujours en train de poursuivre son nain blanc, et elle vit ce dernier disparaître derrière une étrange porte… Une porte qui se tenait entre deux jambes de femme écartées, un portail… Vaginal en quelque sorte.
Passé le moment de surprise où elle se demanda, interloquée, quel pouvait bien être le tordu responsable d’un truc aussi moche, elle décida de ne pas se démonter et de continuer à courser le fautif histoire de bien lui faire payer cet immonde fiasco.

Cependant, alors qu’elle poussait le battant de la porte, son pied se déroba sous elle et elle tomba dans un énorme trou, un trou noir, profond, dans lequel elle éprouva une longue sensation de chute libre.

Elle finit par retomber étrangement sur ses pieds, privilège qu’elle pensait réservé aux félins mais qui ne l’étonna pas outre mesure vu que la porte par laquelle était passée pouvait raisonnablement être comparée à une chatte.
L’endroit dans lequel elle était tombée était très sombre, mais ses yeux de vampires détectèrent en quelques secondes un nombre de rouages incalculables en action, ancrés au mur comme si elle venait de tomber dans la salle des machines du Big Ben.

Soudain, une lumière commença à poindre et elle aperçut, au fond de la salle, son nain albinos. Il lui montrait une énorme montre à gousset qui tournait à toute allure, une sorte de montre folle.

*What the fuck ?* pensa-t-elle, et alors qu’elle s’apprêtait à lui sonner copieusement les cloches elle remarqua que l’individu n’était pas seul mais accompagné d’une jeune fille brune, vêtue de collants à rayures et d’une robe bleue sanglée dans un corset en cuir, une sorte de version maîtresse SM d’Alice aux pays des merveilles.
Cette dernière la fixa droit dans les yeux, dégainant de derrière son dos un énorme couteau de boucher maculé de sang qui se mit à goutter sur sa jupe tandis que le nain blanc se mit à tapoter sur le cadran de sa montre :

C’est l’heure !

*Mais l’heure de quoi, bordel ?* se demanda-t-elle, ne comprenant vraiment rien à rien, et alors qu’elle s’interrogeait sur le sens de cette mascarade elle sentit quelque chose lui couler sur les jambes, et, en baissant les yeux, elle vit avec horreur sur son ventre avait été ouvert en deux, et que de cette plaie béante s’échappaient des suintements fort peu ragoûtants.

Relevant les yeux vers les deux déments, le regard mêlant incompréhension et terreur, elle vit Alice lui tendre une sorte de carcasse écorchée qu’elle tenait par les pieds, et qui ressemblait à s’y méprendre aux lapins qu’on pouvait voir sur les étals des bouchers, mais à y regarder de plus près on pouvait voir qu’il s’agissait non pas d’un lapin mais d’un nourrisson…

C’est l’heure ! répéta-t-elle à son tour alors que le décor autour de la vampire commençait à se regonfler, à tournoyer à toute allure jusqu’à lui redonner le vertige, elle eût à nouveau l’impression de tomber dans un trou sans fond…

Jusqu’à se retrouver sans trop savoir comment sur son vieux matelas, le bide ouvert en deux avec le lycan les deux mains dedans en train de trifouiller et une Milicent défigurée tenant un truc affreux dans les bras…

Ça ne pouvait être qu’un cauchemar, elle ne s’était pas réveillée…

La vampire se mit à alors à hurler en se débattant.

Le doc commençait à stresser, il était heureux de voir le bébé vi… actif, mais il savait que le temps s’écoulait et il n’avait pas encore terminé l’opération. Il restait le placenta à retirer et à refermer le joli petit trou qu’il lui avait fait.

Esténéa semblait contrôler la situation tout comme Milicent, même si elle parlait fortement du nez depuis tout à l’heure. Stasi se concentrerait sur ce détail plus tard, il devait d’abord finir de s’occuper de la nouvelle maman.

Aussi il plaça ses mains dans la plaie béante et commença à retirer le placenta avec beaucoup de précautions. Une fois celui ci enlevé, il le posa dans une serviette sale à coté de lui.

Mais alors que Stasi observait une dernière fois la plaie, avant de la refermer, il sentit la vampire commencer à s’agiter. Stasi devait donc lui injecter une nouvelle dose. Aussi il se retourna et commença de nouveau à remplir la seringue avec les solutions qu’il avait apportées.

Malheureusement Esténea ne put contenir la vampire hystérique plus longtemps et de nouveau elle fut projeté à coté de Llylewin. Moins violement cette fois, peut être avait-elle cette fois ci anticipée les geste de la patronne.
Maintenant Llylewin hurlait et il n’y avait plus rien pour l’arrêter. Le doc ne pourrait pas la refermer comme ça, pire, elle allait aggraver la situation, augmentant l’ouverture en s’agitant. Il n’avait pas terminé le mélange, et la seringue ne contenait que de la morphine, mais le doc devait bloquer la vampire. Aussi il abandonna la seringue pour sauter sur la vampire mettant son visage en face du sien.

« Llylewin, c’est moi Stasi, tu dois te calmer, tu dois te souvenir, tu es dans ta chambre au Quality Street. »

Il luttait pour tenter de maintenir sa femme sur le sol, essayant de l’empêcher de bouger.

« Milicent, Esténéa, la seringue ! »

Il espérait que l’une des girls se saisisse de la seringue et soit lui passe, soit lui injecte afin de la calmer qu'il puisse enfin la recoudre tranquillement.

« Llylewin, c’est moi, ton bébé rappelle toi ! »

Il avait de plus en plus de mal à maintenir la vampire et ses yeux brillaient d’un jaune inquiétant…

« Dépêchez-vous ! »

Spoiler:

Tout semblait se dérouler sans aucun incident supplémentaire et tout le monde sait bien que nous adorons quand un plan se déroule sans accro… mais bien évidemment les choses ne pouvaient pas durer. Après tout la venue d'un bébé vampire n'était bien sûr par suffisante pour perturber le quotidien déjà houleux des habitantes du QS, il fallait en rajouter encore une couche.

Ce que fit la patronne en se mettant à hurler comme un cochon qu'on égorge. Mais, attendez voir, un cochon ça peut pas crier vu qu'il est égorgé ? Enfin là n'est pas le sujet n'est ce pas ?

Alors imaginez, Llylewin qui hurle, Esté qui semblait comme tétanisée par les évènements et surtout le Doc qui semblait sur le point de perdre le contrôle. Elle ne l'avait jamais vu se transformer mais connaissait un peu les lycans grâce à sa collègue. Et elle savait que ce regard ne présageait rien de bon mais entre une vampire hystérique et un lycan hors de contrôle, elle risquait d'avoir du mal à survivre.

Alors elle fit ce qu'elle savait faire de mieux, agir sans réfléchir.

Se saisissant de la seringue, elle la planta où elle put de toute ses forces sur la vampire, réussissant à atteindre le haut du bras et la laissant plantée sans chercher à l'enlever. Après tout, chaque problème en son temps. Elle réprima une moue mais la patronne bougeait trop pour pouvoir faire quoi que ce soit, elle verrait plus tard.

"Braiment dédolée patronne…"

Elle se précipita alors vers Esté et lui planta le bébé dans les bras.

"Doi, gère Da ! Dinon on ba pas d'en dortir !"

De toute façon, la petite chose bleue ne risquait pour l'instant pas d'être une source de problème, tout du moins elle l'espérait. Elle chercha du regard quelque chose qui pourrait détourner l'attention du lycan et peut-être réussir à le calmer un peu, le temps qu'il reprenne ses esprits au moins.

Un morceau de l'une des colonnes du lit traînait encore sur le sol, au milieu d'autres débris de ce qui avait été, sommes toutes, une bien jolie chambre avant la fin du monde. Elle attrapa le morceaux à deux mains, laissant échapper un "ahaaan" et surtout un flot de sang de son nez. Si ça continuait comme ça, elle n'allait pas tarder à tourner de l'œil, tiens d'ailleurs les petits points noirs là, ils sont rigolos… Non ! Elle secoua la tête. Le malaise c'était pour les chochottes et si elle avait appris quelque chose pendant ses années de boulot avec Llyl c'est qu'elle était tout sauf une chochotte.

Animée de tout ce qui lui restait comme force, elle asséna de toutes ses forces un coup au Doc, espérant que ça marcherait…

Avant qu’elle ait eu le temps de comprendre quoi que ce soit, Llylewin se faisait injecter une nouvelle dose de drogues dans les veines, qui ne tarda pas à arriver jusqu’à son cerveau.

La vampire eut alors, après sa chute vertigineuse, l’impression de tomber à nouveau mais dans l’autre sens, comme si une force irrésistible l’aspirait vers le haut alors son univers alentour se remettait non pas à fondre, mais à blobloter comme de la jelly anglaise : la dose n’était plus assez forte pour la faire planer totalement, mais assez pour la replonger dans son délire.

Ainsi, réel et fantasmagories se mélangeaient, et dans sa chambre au mobilier tremblotant et où sa girl venait d’en coller une au lycan qui venait de l’accoucher, la Alice brune prenait le thé avec le nain albinos à la montre sur sa commode à lingerie, et bizarrement c’est ce duo improbable qui retint toute son attention.

Tu vois, je te l’avais dit que ça ne se passerait pas bien, fit Alice à l’albinos, comment voulais-tu que ça aille avec une équipe de bras cassés pareille ?

Je ne vois pas de quoi tu parles, rétorqua le nain après avoir siroté une gorgée dans sa tasse en porcelaine, enfanter c’est quelque chose de parfaitement naturel, même pour les vampires, il n’y avait aucune raison pour que ça ne se passe pas bien !

Tu penseras ce que tu voudras, fit la brunette en sortant de Dieu-sait-où un toast beurré et en croquant dedans, mais tu es bien forcé d’admettre que le résultat se pose là enfin, continua-t-elle en répandant des miettes.

De toute façon ça ne sert à rien de discuter de cela avec toi, tu dis ça simplement parce qu’elle ressemble à la Reine Rouge et que tu ne peux pas la piffer !

Ouais, pas faux, répondit Alice en terminant son toast, n’empêche que…

RAAAH ? ASSEZ ! Explosa Llylewin en balançant au duo bavard un des coussins qu’elle avait dans le dos, n’importe quoi pourvu qu’ils se la ferment ! Elle se recouvrit ensuite la tête d’un autre coussin, tout ce qu’elle voulait c’était du silence pour se reposer, elle se sentait tellement fatiguée, à bout de forces…

Même dans le pires des scénarios que le doc avait prévu cela ne devait pas aussi mal se dérouler. Pourtant il c’était vraiment préparer au pire ! Il fallait dire qu’avec Llylewin il avait finit par s’habituer aux imprévus catastrophique… Depuis leurs premières rencontre d’ailleurs. Avec ce lycan étrange qui c’était fait étaler par une jeune fille de 5 ans dans un bar à 1 heure du matin, il aurait du se méfier et l’éviter comme la peste… Un véritable aimant à catastrophe, voilà ce qu’était cette vampire !

Le doc n’arrivait plus à tenir Llylewin qui hurlait à la mort, il était trop loin de la seringue pour s’en saisir et n’avait plus que ses deux assistantes pour se sortir de ce pétrin, sachant que la première avait cassé la solution anesthésiante et la seconde était paralysée sur le coté... Enfin pour couronner le tout, il sentait une profonde rage monter en lui, ainsi qu’une inextinguible soif de sang et de chair…
Il devait se contrôler, il devait se calmer, mais plus facile a dire qu’à faire alors que Llylewin, le ventre encore ouvert hurlait à la mort en se débattant.

Mais alors que le doc n’avait plus grand espoir, Milicent se saisit de la seringue et l’enfonça directement dans le ventre de la vampire. Le doc fut tellement surpris, tellement content que sur le moment s’il avait pu il aurait sauté sur la girl pour l’embrasser. Il se retourna alors pour observer la vampire qui commençait à se calmer, sans doute de nouveau en transe.
Et dans un soupir de soulagement il se détendit, et ouvrit la bouche pour remercier celle qu’il allait nommer assistante de l’année… Enfin il n’eut pas le temps de sortir le moindre mot, car pile à ce moment là, Stasi sentit une violente douleur sur le crâne. A moitié choqué il bascula à coté de Llylewin

« Mais qu’est ce... que… »

Il aperçut alors son « assistante préférée avec un morceau de bois à la main.

« Mais tu fous… quo… »

Impossible de finir sa phrase interrompu par un cri intérieur


Le doc se recroquevilla en hurlant de douleur alors qu’il sentait la bête surgir du plus profond de ses entrailles.

« Noon pas mainnteennaannnttt...»

Il avait du mal à s’exprimer serrant ses dents comme si cela permettait de contenir le monstre qui était en lui, comme si la bête était tellement proche, que le simple fait d’ouvrir la bouche la laisserait sortir. Il devait lutter, il devait réussir à la contenir il devait

POUF !

Oui pouf, c’est le son qui se produisit alors que le doc se prit en pleine figure l’oreiller lancé par la vampire qui était en plein délire.
Un oreiller, un simple oreiller qui suffit à créer la rupture, d’un coup tout lui revint à l’esprit, la vampire l’opération, l’urgence. Et d’n coup la bête se tut. Difficile d’expliquer pourquoi, mais c’était l’occasion à saisir.

Stasi posa l’oreiller à coté et fit un petit sourire à ses assistantes afin de montrer qu’il avait de nouveau le contrôle. Puis il prit du fils et une aiguille et referma l’ouverture de Llylewin en quelques minutes. Sans un mot se focalisant sur l’opération.

Enfin il se taillada de nouveau l’avant bras avec une de ses lames et il se plaça à proximité de la nouvelle maman, elle devait urgemment reprendre des forces.

« Une fois que tous ça est terminé je m’occupe de ton nez Milicent. »

Sa voix était encore tremblotante, toute cette histoire avait éprouvé le doc.

Finalement et, contre toute attente, enfin surtout la sienne, l'aiguille qu'avait planté Milie dans le corps de Llyl avait fait son petit effet. Après quelques secondes d'agitation elle avait fini par retomber dans une espèce d'inconscience dont elle n'allait pas émerger de suite, tout du moins elle l'espérait.

En parlant d'inconscience, Milie voyait de plus en plus de petites mouches voler devant ses yeux. Des espèces de tâches noires alors qu'elle sentait le monde qui commençait à tournoyer tout autour d'elle, sans qu'elle arrive à l'arrêter.

Bien évidemment, le coup porté au Doc n'avait servi à rien, si ce n'est à l'énerver et, sans le miracle de l'oreiller, elle envisageait sérieusement, une fois tout ça terminé d'adopter cet oreiller et de ne plus jamais s'en séparer - d'ailleurs elle comptait l'appeler Poufman en souvenir de son acte héroïque qui lui avait surement sauvé la vie mais là n'était pas le sujet et visiblement - elle commençait légèrement à délirer un peu beaucoup, elle se demandait si elle n'aurait pas fini en charpie, dévorée dans une chambre de bordel. Si ça c'était pas une fin de vie originale, elle ne savait pas ce que c'était alors…

Alors qu'il retrouvait son calme, elle essaya de soupirer de soulagement, laissant échapper des espèces de borborygmes qui ressemblaient vaguement à des mots, enfin elle essayait de communiquer quoi, mais c'était vraiment de pire en pire.

"Dédolée pour de badon ! D'abais pas d'audre idée… Bais da da dien on dirait ! Du dais doi dà ?"

Son regard passait du doc au ventre qu'il était en train de recoudre avec rapidité et dextérité. Son nez était en train d'enfler et de devenir de plus en plus douloureux et ses yeux pleuraient sans même qu'elle s'en rende compte alors qu'elle respirait de plus en plus bruyamment, petit détail qui ne passerait pas inaperçu auprès du Doc.

"Bon dez ? Faut pas doucher ! Da fait trop maaaaaa!"

C'est le moment qu'elle choisit pour tourner de l'œil. Un peu, mais pas trop, juste ce qu'il faut pour tomber la tête en avant sur poufman et se redresser en hurlant de douleur parce que, moelleux ou pas, ça faisait toujours mal un nez cassé.

"Aïe…"

Les effets des drogues s’estompaient désormais de façon nette et la vampire reprenait doucement pied, à son grand malheur.

Elle avait en effet désormais le privilège de ressentir tous les traumatismes subis par son organisme : les chairs tiraillées, découpées, rassemblées lui faisaient percevoir une douleur à nulle autre pareille comme si ses boyaux étaient totalement à vif.
Ces sensations atroces la vidaient de son énergie, et alors qu’elle s’illustrait brillamment quelques instant plus tôt dans la discipline du lancer de coussin elle n’avait désormais plus qu’une envie, celle de fusionner avec son matelas de se morfondre jusqu’à ce que mort s’en suive.

C’était vrai quoi, son affaire qu’elle avait eu tant de mal à construire était désormais aussi ravagée que son bas-ventre, qui elle en était sure resterait défiguré à vie. Ce qui n’était pas une grande perte d’ailleurs, car elle avait la profonde conviction qu’elle ne pourrait plus jamais voir un phallus sans vomir. Le phallus, celui par qui le malheur était arrivé.

Pas seulement le malheur en fait, mais également cette chose grisâtre, fripée et chevelue moche comme un pou qu’Estenea tentait de lui tendre et qu’elle rabroua aussitôt :
Non mais c’est quoi cette horreur ! Tu veux bien me retirer ça de sous le nez s’il te plait, tu ne crois pas que j’ai déjà assez souffert comme ça non ?

Elle se ratatina ensuite encore un peu plus sur sa couche qui ressemblait plus ou moins au radeau de la méduse, les navigants en moins : le témoin d’un magnifique naufrage.

Sur le moment peu lui importait les personnes autour d’elle, elle ne leur prêtait aucune attention, la seule certitude qui l’assaillait en réussissait à transpercer l’épais manteau de la douleur était que sa non-vie était de la merde et qu’elle était foutue, et ce pour les siècles à venir.

Autrement dit par une célèbre humoriste « Baby blues ? Non, Johnny il a le blues, toi tu fais une dépression post-partum » !

On ne pouvait pas dire que le contact entre Llylewin est son enfant se soit déroulé classiquement. D’habitude les mamans, épuisée, regardaient le petit être avec des yeux brillants de bonheur, esquissant un joli sourire et tentant, avec le peu d’énergie qui leurs restaient, de s’en saisir.
Avec la vampire l’évènement se passa différemment, et ce n’était pas un euphémisme loin de là! Le premier réflexe de Llylewin fut de tenter de se débarrasser du fruit de ses entrailles comme s’il était pourri.
Le doc ne pouvait pas forcément lui en tenir rigueur vu comment c’était déroulé l’accouchement. Le doc fit signe à Esténéa de le garder, et de nouveau plaça son bras ensanglanter devant la bouche de la vampire.

« Toi prend des forces tu en as bien besoin après ce que tu viens de vivre. »

Il fit un petit signe à Milicent lui demandant d’approcher afin qu’il puisse observer son nez. Il occulta la jeune femme avec son bras de libre, touchant délicatement l’appendice.

« Milicent je suis désolé mais tu as le nez cassé, rien de grave, une petite attelle pendant une dizaine de jours devrait suffire. Il faudra juste qu’on passe à la clinique une fois que j’en aurais terminé ici. »

Toujours sans bouger, il s’adressa cette fois ci à la vampire.

« Llylewin tu as besoin de prendre des forces, et ton bébé c’est pareil. Je ne pense pas qu’il cherche le sein, je dirais plutôt le sang. Mais vu sa petite taille ses besoin ne seront pas aussi important que les tiens donc tu pourras le nourrir et même une de tes grils pourra s’en charger sans que sa vie soit en danger. Avec son accord bien entendu. »

Le doc attendait que Llylewin ait terminé avant de bouger.

Du peu qu'elle pouvait l'apercevoir, Llyl faisait preuve d'un instinct maternel qu'un piranha, ou tout du moins l'image que Milie se faisait de ces petits poissons aux dents longues. Elle se demanda vaguement si elle avait les dents aussi pointues que cet animal avant de se rappeler qu'il lui fallait une concentration inhabituelle pour arriver simplement à respirer.

Elle se laissa examiner sans bouger, ne pouvant s'empêcher de laisser échapper un petit couinement de douleur et de sentir les larmes lui monter aux yeux.

"D'ai le dez dassé ? Da ba laidder des barques ?"

A la remarque sur le bébé vampire qui allait se nourrir de l'une d'entre elles, elle ne put s'empêcher de frissonner. Il faut dire qu'elles n'étaient plus très nombreuses au QS et que c'était le genre d'activité qui risquait de faire fuir certaines filles… ou alors ne seraient concernées que celles déjà au courant, ce qui la mettait dans le top 2 ou 3 et qui n'était pas vraiment pour la rassurer.

Enfin, chaque problème en son temps. Tout d'abord, elle devait arriver à se lever et à marcher jusqu'à l'entrée sans tomber en court de route pour accompagner le doc à la clinique.

"De de duis adors !"

Un bref regard à la patronne et elle agita la main pour lui dire au revoir, lançant un regard qu'elle jugeait suffisamment compatissant au vu de la situation à Esté avant de se lever et de tanguer vers la sortie. Il lui fallut un bon moment pour atteindre l'entrée et elle s'installa sur une chaise près de la porte à moitié défoncée, manquant plusieurs fois de s'endormir en attendant que le Doc la rejoigne. Elle espérait qu'elle aurait des médicaments qui lui feraient oublier la douleur et voir un peu la vie en rose. Après une journée pareille… enfin après les dernières semaines, ce serait quand même cool non ?

La vampire esquissa une moue boudeuse devant le bras à nouveau tendu du lycanthrope. Non, elle n’avait pas envie de boire ça, elle en avait déjà pris tout à l’heure et en plus elle n’aimait pas spécialement le goût, mais elle ne se fit pas prier longtemps cette fois-ci : elle souffrait tellement qu’elle aurait été prête à ingurgiter n’importe quoi lui promettant une guérison plus rapide.

Elle planta donc ses crocs dans l’avant-bras de Stasi qui avait conservé les marques de la dernière morsure, une sorte "d’ouverture facile" pour vampire, et absorba une bonne rasade de son fluide vital.
Elle fut au final assez déçue de cette opération, car elle ne ressentait aucun mieux immédiat : la convalescence serait longue… Agacée, elle se laissa choir sur son matelas en soupirant, les yeux perdus dans le vide…

Enfin, jusqu’à ce qu’elle réalise que Milicent et Stasi prévoyaient de mettre les voiles et de la laisser seule avec Estenea sur son épave, son matelas dégoûtant, son ventre à peine recousu…

C’en était trop pour elle. Mobilisant ce qui lui restait d’énergie dans les tripes, elle explosa :

Alors ça y est, vous me laissez en plan ? Et je suis censée faire quoi moi, sans antalgiques, sans rien, me tourner les pouces jusqu’au jugement dernier ? C’est ça, barrez-vous, barrez-vous tous, et emportez l’autre détritus avez-vous ! fit-elle en désignant Estenea et le bébé du bras avant de se tourner face contre le mur, bras croisée, fulminant.