Winnifred et Nadja reçurent ce parchemin par courrier la veille de la chasse au trésor :

Verso de Winnifred:

Verso de Nadja:

Ce matin, Nadja venait d'émerger du coma éthylique quand la logeuse vint frapper à sa porte. La vieille dame était porteuse d'une missive assez...énigmatique. Le regarde de la russe s'éclaira d'une lueur malicieuse quand elle reconnut le parchemin. Elle s'était inscrite à une sorte de chasse au trésor organisée par la municipalité. Ça pouvait paraître farfelu, mais ça lui avait paru être la meilleure façon de s'intégrer un peu mieux à la population de Galway. Dans le fond, ce n'était qu'une énième mission d'infiltration. Se mêler à la population, gagner la confiance des habitants. Sauf que le but n'était pas de frapper un ennemi par surprise, mais bien de planter ses choux en paix, en espérant que son passé ne la rattraperait pas une nouvelle fois. Nadja lut donc le papier. La ménagerie fantastique ? Il allait falloir qu'elle se renseigne pour savoir où se trouvait donc cet endroit. Le temps de sauter dans son treillis et elle était partie. Pour sûr, elle partait avec un désavantage par rapport aux gens du coin qui connaissaient mieux qu'elle la ville, mais elle était tenace, et restait prête à surmonter son handicap.

C'est donc assez rapidement qu'elle trouva le lieu-dit, après avoir demandé son chemin à un riverain (et lui avoir cassé la figure quand il avait réclamé de l'argent en échange de ce renseignement). L'ancienne ménagerie du Zombillenium était lugubre à souhait. Les enclos vides semblaient avoir accueilli jadis des créatures louches. Par contre, ça se corsait un peu. Au verso du parchemin se trouvait un texte qui ne voulait rien dire. Assurément, il n'était pas complet, mais où se trouvait l'autre moitié ? L'autre côté parlait de deux autres parchemins. Est-ce que ça voulait dire que quelqu'un d'autre l'avait reçu ?

Nadja n'aimait pas beaucoup dépendre de l'aide de quelqu'un d'autre. Elle avait surtout l'habitude du travail en solo. Enfin, elle pourrait sans doute faire avec. Si l'autre en question était un boulet, elle se sentait capable de faire des efforts pour deux. Son corps, en tout cas, ne l'avait jamais trahie. Mais encore fallait-il le trouver, cet autre candidat !

En déambulant entre les enclos, Nadja finit par repérer une adolescente habillée de façon assez excentrique. L'ex-militaire vomissait le rose. Ça commençait bien...

-Hé, petite ! C'est toi, qui as l'autrrre moitié de l'énigme ? Tu sais ? Saint-Patrrrick machin-chose.

Elle semblait un peu coincée du derche, la petite. Aaaah... Décidément, les jeunes étaient trop timides.

-D’après ce que j’ai compris, on est censées rassembler nos deux parchemins pour avoir l’énigme en entier, parce que pour le moment moi j’ai « Mieux que la quantité ? symbolise la revanche des le sol irlandais, il vous pour la suite de l’aventure » et ça me parle pas des masses pour le moment…

Nadja hocha pensivement la tête. Les énigmes, ce n'était vraiment pas son truc, mais elle avait tout de même assez de cervelle pour comprendre que le texte de la gamine était bel et bien la partie manquante de son texte à elle. La russe sortit le parchemin de sa poche de pantalon et le plaça à côté de celui de la fillette.

-"La qualité vaut-elle mieux que la quantité ? Rrretrrrouvez l'être qui symbolise la rrrevanche des crrréatures rrrampantes surrr le sol irrrlandais, il vous donnerrra la clé pourrr la suite de l'aventurrre". C'est ça ! Les crrréaturrres rrrampantes, c'est sûrrrement des serrrpents. Il y avait des serrrpents, ici ?"

On pouvait être une ex-militaire russe alcoolique, cinglée et un peu molle du bulbe, ça n'excluait pas de savoir résoudre des problèmes qui n'auraient pas posé de problème à un gamin de 13 ans.

-Tu crrrois qu'il rrreste des animaux dangerrreux, parrr ici ?

Les enclos semblaient vides. Mais la ménagerie de l'ancien parc d'attraction avait la réputation d'avoir abrité de sacrées horreurs. Il n'y avait probablement aucun danger, si c'était un simple concours organisé par la mairie. Mais Nadja était ainsi, elle ne pouvait s'empêcher de considérer sa situation d'un point de vue tactique, elle avait été entraînée pour ça...

Nadja regarda autour d'elle en écoutant Winnifred. Les bestioles, pas de problème, elle était capable de tuer un ours à mains nues sans même se transformer, mais elle ne comprenait pas grand chose aux énigmes, ni à la zoologie.

-Une chenille géante ? Il y a quoi, dans cette ménagerrrie ? Des mutants ?

Elle avait voyagé aux quatre coins de globe, vu pas mal d'animaux exotiques, mais rien qui sorte vraiment de l'ordinaire. D'ailleurs, la grande majorité des noms qu'elle avait lu sur les cages en arrivant ne lui rappelaient rien mais ne pouvaient qu'appartenir à des bestioles immondes.

-T’en dis quoi ?.. On se lance à la recherche de notre bestiole ?

Nadja haussa les épaules.

-Ben moi je te suis. Tu as l'airrr de mieux connaîtrrre les lieux. Moi je ne comprrrends rrrien aux énigmes, ni au folklorrre local, et je ne suis jamais venue ici. Parrr contrrre, si la clé qu'on doit trrrouver est difficile d'accès, je pourrrais la rrrécupérrrer.

Winnifred la tête et Nadja les muscle, ça pouvait faire une bonne équipe. Enfin...à conditions que les deux comparses réussissent à s'entendre.

-Tu crrrois qu'elle serrra planquée dans la cage d'une bestiole dangerrreuse ?

-Des mutants ? Non, pire que ça, des créatures légendaires… Tu sais les trucs qui te faisaient flipper quand tu étais gosse, hé ben en fait il y en a qui existent vraiment, et ils sont tous parqués ici ! Quand on y repense, les gars du Zombillenium c'étaient carrément des barjos...

Nadja haussa les épaules. Même enfant, elle n'avait jamais eu peur du croque-mitaine ou d'un quelconque monstre de légende. Même les histoires de Baba-Yaga racontées par sa mère n'avaient pas réussi à lui faire manger sa soupe. Et bien sûr, en grandissant elle n'était pas devenue plus superstitieuse. Bon, elle était tout de même bien placée pour savoir que les loups-garous et les vampires existaient, mais il en fallait beaucoup plus pour l'intimider.

-Ha… Carrément DANS les enclos, tu penses ? Y a pas intérêt, les monstres qu’il y a là-dedans c’est des mangeurs de chair humaine ou bien des trucs marins, ça nous laisserait le choix entre mourir noyé ou déchiqueté, super…

Nouveau haussement d'épaules de Nadja.

-Boh ! Moi, en tout cas, c'est là que le l'aurrrais cachée. Dans l'enclos, et même carrrément en pendentif autourrr du cou d'un animal parrrticulièrrrement teigneux.

La russe suivit Winnifred en regardant dans les cages autour d'elle.

-Tchort ! Qu'elles sont moches, ces bestioles ! Qui peut bien avoirrr envie de venirrr voirrr des horrreurrrs parrreilles ? Rrregarrrde celui-là, on dirrrait qu'il s'est baigné dans le bassin de rrrefrrroidissement du rrréacteurrr de Tcherrrnobyl ! Bon...on va à drrroite.

Les deux comparses d'infortune avancèrent plus profondément dans la ménagerie, et ça ne s'arrangeait pas. Chaque créature était plus laide que sa voisine. Si Dieu existait, il devait avoir bu un coup de trop la jour où il avait créé ces bestioles, se dit Nadja. En cherchant bien, elles finirent par arriver devant la cage du Ver de Lambton.

-Bon, le coup du cheval de mer mangeur de chair humaine je ne pense pas que ça soit le bon truc, mais l’autre machin là, le Ver de Lambton, c’est bien une bestiole qui rampe non ?

Nadja sourit, elle avait bien capté ça dès la seconde où elle avait lu l'écriteau. Normalement, un ver, ça rampait, quelle que soit sa taille...à moins que ce ne soit une saleté de monstre volant (ce qui n'aurait rien eu d'étonnant vu l'allure des autres animaux). La lycanne regarda dans l'enclos. Le fameux ver n'était pas là, ou bien s'il était là il n'était pas visible pour le moment. Difficile de dire si c'était un bien ou un mal, vu la description qui en était faite.

-Ouais. Ça se pourrrait bien que ce soit ça. Bon, alorrrs on n'a qu'à fouiller autourrr de la cage. Et si on ne trrrouve rrrien, il faudrrra bien se rrrésoudrrre à entrrrer là-dedans.

Bien sûr, Nadja n'était pas un monstre. Elle voyait bien que Winnifred n'avait pas le gabarit d'une femme d'action. S'il devenait nécessaire de déranger le ver dans sa demeure, la russe s'y collerait seule.
Elle se mit donc à chercher autour du fameux enclos si elle ne trouvait pas une clé, un papier, un indice quelconque. L'ex-spetsnaz n'était pas une vraie enquêtrice, mais elle avait de très bons yeux et savait repérer les petits détails furtifs. La végétation à moitié brûlée aux alentours n'était pas un bon signe.

A force de chercher autour de l’enclos, nos deux comparses tombèrent vite sur un étrange objet coincé entre deux pierres : un tube en PVC recouvert d’une clé ancienne de type celtique.

Le tube en PVC renfermait un nouveau parchemin, roulé à l’intérieur :



[N.B: Le parchemin ne sera révélé qu'à ceux qui posteront à la suite de ce topic]

-Hey, heu… Madame !

Nadja se tourna

-Nadja.
-regarde, je crois que j’ai trouvé ce qu’il nous faut !

La jeune fille brandissait une clé accrochée à une sorte de tube en plastique. Pas besoin d'être un génie pour comprendre du premier coup d’œil que c'était ce qu'elles cherchaient.

-Bien joué ! lança-t-elle en rejoignant Winnifred.

Elle se plaça derrière son acolyte et regarda par dessus son épaule l'ouverture du tube et le dépliage du parchemin qu'il contenait. Ça parlait de trèfles, encore un truc d'irlandais. Il était question de cueillir des trèfles pour les apporter à la serveuse d'un bar local, au moins ça avait le mérite d'être limpide. Nadja sourit en se demandant si la barmaid était jolie, et si elle aurait le temps de boire un verre.

-Quoi ? Faire la cueillette alors qu’il fait nuit ? Sont chiés quand même…
-Boah ! Moi j'ai pas peurrr de dérrranger les trrrèfles dans leurrr sommeil. Parrr contrrre, je sais pas où on peut en trrrouver.
-Bon, en remontant la route du Docteur Manix qui est juste derrière la ménagerie on devrait arriver dans la lande et trouver ce qu’il nous faut… J’ai une lampe aux UVs pour nous aider, ça ne te pose pas de problèmes ?
-Quoi ? Non, pas de prrroblème ! J'ai rrrien à voirrr avec ces connarrrds de vampvamps. On peut y aller tout de suite !

Les rencontres de Nadja avec des vampires se comptaient sur les doigts d'une main, mais à chaque fois ça s'était plus ou moins mal passé. La russe avait donc une assez mauvaise opinion des gens aux dents longues. Elle avança donc d'un pas décidé dans la direction indiquée par Winnifred, bien décidée à trouver les trèfles en vitesse.

-Cool, ça me fait une chance de moins de finir à l’hosto cette fois-ci !

Winnifred semblait soulagée que Nadja ne soit pas une vampire. Avait-elle aussi de mauvais souvenir avec les suceurs de sang ? Enfin, elles auraient tout le temps de faire connaissance par la suite.
Elles avancèrent donc sur le chemin, à la lueur faiblarde de la lampe de la gamine. Sans doute avait-elle une trop mauvaise vision nocturne pour pouvoir faire trois pas dans cette pénombre sans s’étaler de tout son long. Nadja, en tout cas, n'avait pas besoin de lampe. Elle avait une très bonne vision nocturne, de par sa nature, mais elle n'en avait pas tellement besoin...

-Bon, manifestement il n’y a rien ici, c’est que de l’herbe sèche… Faut déjà chercher un coin avec plein de verdure, c’est là qu’on a le plus de chances d’en trouver… T’as une bonne vision nocturne pour déterminer les couleurs ou bien est-on condamnées de se la jouer « Les Experts » avec ma pauvre loupiote ?
-Ouais, j'ai une assez bonne vision nocturrrne, mais pas besoin. Tu sais, quand on a un sens qui ne fonctionne pas, il faut savoirrr utiliser les quatrrre autrrres.

Nadja posa un genou à terre et tâta l'herbe.

-Rien qu'à l'odeurrr, on peut sentirrr que la terrre et sèche, et déduirrre qu'en effet, l'herrrbe n'est pas trrrès vivace, pourrr ne pas dirrre carrrément morrrte.

Elle avança un peu et ramassa une sorte de petite bille.

-Ça, parrr contrrre, c'est un indice intérrressant. C'est une chiurrre de lapin, et ces sales bestioles rrraffolent des trrrèfles. Donc, parrr-là !

Nadja se releva et ouvrit la marche, suivant les crottes de lapin. Ce qu'elle venait de sortir n'était rien d'autre qu'un échantillon de ce qu'on lui avait appris au cours de pistage du stage de survie en milieu inhospitalier qu'elle avait suivi quand elle était au Spetsnaz.
Enfin elles arrivèrent dans une zone plus verte.

-Aaah ! Voilà ! Ici c'est déjà plus ferrrtile, ça se sent à l'odeurrr de la terrre, bien noirrre. Je vais te filer un trrruc de cultivateurrr : la terrre, plus elle est foncée meilleurrre elle est pourrr fairrre pousser des trrrucs. Il y a aussi les brrruits des diverrs petits animaux qui trrraînent dans le coin, comme les lapins justement.

Elle se baissa et tâta l'herbe.

-...Et enfin, il y a la texturrre rrriche et bien grrrasse de ces trrrèfles. Allez, cueillons ce foutu bouquet. J'espèrrre qu'il y aura un trrrèfle à quatrrre feuilles dans le lot...

-Wow, c’est classe ton pouvoir dis-donc ! T’as bossé dans la police scientifique ou quoi, parce que là même Grissom il fait petit joueur à côté de toi…
Je me charge de cueillir les 10 trèfles à 3 feuilles, je te laisse partir en quête de l’exemplaire 4, t’as l’air d’être de t’y connaître vachement mieux que moi, si je m’y colle entre ma guigne légendaire et ma pauvre petite lampe torche on y sera encore demain !

Face au ton admiratif de Winnifred, Nadja se sentit fière, et s'accorda même quelques minutes pour crâner. Ce n'était pas tous les jours qu'on lui faisait un compliment, même si elle en méritait souvent par les tâches ardues qu'elle abattait sans sourciller.

-C'est dommage qu'il n'y ait plus le serrrvice militairrre dans la pluparrrt des pays d'Eurrrope, les jeunes apprrrendrrraient plein de choses utiles. C'est clairrr que c'est pas au collège qu'on vous apprrrend à fairrre du feu avec du bois mouillé ou à planter sa baïonnette dans le ventrrre d'un ennemi et pas dans les côtes où elle rrrisque de se coincer.

Nadja entretenait une relation amour-haine avec le milieu scolaire. Elle avait conscience de ne pas être une lumière, et se faire humilier en classe ne lui avait jamais manqué. Mais d'un autre côté, elle se surprenait à se demander à quoi elle ressemblerait aujourd'hui si elle avait fait des études. Sans doute serait-elle moins cabossée, probablement qu'elle aurait passé plus de temps dans un bureau que dans la boue. Enfin, plus elle y réfléchissait plus l'éventualité d'être une bureaucrate la faisait frissonner. Non, elle n'aimait pas les bureaucrates !

-Alors Nadja, t’as trouvé de quoi nous porter chance ? On peut partir vers l’étape suivante ?

Nadja montra avec fierté le trèfle à quatre feuilles qu'elle venait de trouver.

-Décidément, c'est peut-êtrrre le moment pourrr moi de tenter ma chance au millionnairrre. Allons au barrr sans plus tarrrder. Prrrenons ma voiturrre, on y serrra plus vite.

Nadja se releva et fit marche vers la sortie de la ménagerie, où l'attendait la Gaz-69.

-Heu… T’as un permis pour aller avec ce truc ? C’est encore autorisé à rouler ?

La gamine semblait quelque peu réticente à monter dans la voiture. Nadja ne comprenait pas pourquoi. Sa jeep lui avait toujours donné satisfaction malgré son âge. Fabriquée pendant la guerre froide, elle avait été utilisé comme véhicule logistique par une unité de parachutistes avant d'être affectée aux forces spéciales du GRU. Nadja l'avait prise pendant sa fuite, après que le KGB ait décidé de la faire taire définitivement, et depuis elle ne s'en était plus séparée. Bien entretenu, le moteur tournait toujours au quart de tour.

-Ben pourrrquoi tu dis ça ? Elle marrrche trrrès bien, ma voiturrre ! Elle peut rrrouler surrr n'imporrrte quel type de terrrain, et on peut y metrrre 500kg de matérrriel, idéal pourrr fairrre les courrrses. Et puis tu peux y aller, c'est du bon vieux métal, c'est bien plus sécurrrisant que les voiturrres en plastique d'aujourrrd'hui.

Nadja ne se sentait aucune affinité avec les voitures actuelles. Fragiles, pleines de plastique et de gadgets inutiles qui faisaient "bip", et complètement moches à force d'être toujours plus aérodynamiques. Elle avait surtout en horreur les voitures de sport, qui en plus d'avoir une gueule aplatie et de sentir le plastique, était trop exigües pour que quelqu'un de sa stature puisse se sentir à l'aise. Ces voitures-là avaient tendance à rendre Nadja claustrophobe.
Après avoir tapoté affectueusement la carrosserie de la jeep, Nadja ouvrit la portière et monta dedans.

-Vas-y, grrrimpe, Uchenik. dit-elle en ouvrant la porte passager.

L'intérieur du véhicule était aussi spartiate que l'extérieur, mais très spacieux. En montant, Winnifred vit quelque chose qui dépassait de sous son siège. En se penchant, elle put voir un AK-74 abandonné sur le plancher du véhicule.

(Je suis parti du principe que Winnifred finirait par monter. Dans le cas contraire, je modifierais.)

-C’est quoi ce machin ?

Nadja baissa les yeux et vit le fusil d'assaut qui dépassait de sous le siège passager avant. Elle s'en était servi pour couvrir sa fuite de Berlin et l'avait jeté en vrac à l'arrière du véhicule en démarrant. Sans doute avait-il glissé sous le siège avec les cahots de la route. Elle ne l'avait alors pas vu au moment de décharger la voiture pour s'installer à Galway. Elle prit l'arme par le canon, pas gênée pour un sou. Au poids elle sentit tout de suite que le chargeur était vide. Il était vrai qu'elle avait tout tiré en arrosant ses poursuivants. Elle remit la sécurité et le jeta à l'arrière.

-Tu serais pas antiquaire ou un truc du genre ? Ou alors tu fais partie de ces fans de la seconde guerre mondiale qui collectionnent les objets d’époque pour faire des reconstitutions ?

Elle aurait bien donné une baffe à Winnifred pour avoir dit une bêtise pareille, mais enfin, ce n'était qu'une néophyte.

-Mais nan ! Rrrien à voirrr avec la seconde guerrre mondiale. C'est un AK-74, comme son nom l'indique, il date de 1974. Non, je ne suis pas antiquairrre. Je suis juste une femme qui trrraîne beaucoup de casserrroles derrrièrrre elle, et qui doit toujourrrs rrrester surrr la défensive.

La russe ne comptait plus les assassins lancés à sa poursuite qu'elle avait massacrés. sa tête était mise à prix dans les milieux mafieux de plusieurs pays. Elle était ainsi, où qu'elle aille elle attirait la mouise.
La grosse voiture fila dans les rues de Galway avant de s'immobiliser devant le Bloody Valentine en un coup de frein qui faillit envoyer Winnifred à travers le pare-brise.

-Tiens. Je te laisse offrir ça à la serveuse, en tant que mineure je suis pas certaine d’avoir le droit de fricoter avec une dame dont le job est de vendre de l’alcool…

Nadja prit en souriant le bouquet tendu par l'adolescente.

-Pas de lézarrrd, Uchenik ! C'est un trrruc dont je peux m'occuper.

L'ex-spetsnaz sortit de la voiture et entra dans le bar, précédant Winnifred de sa démarche assurée. Elle s'approcha du comptoir et tendit le bouquet à la barmaid en revêtant son plus beau sourire.

-Héy ! Bonsoirrr, beauté. Est-ce que ces quelques trrrèfles peuvent fairrre plaisirrr à une jolie fille comme vous ?

Quoi ? Être en mission ne voulait pas dire qu'on ne pouvait pas s'accorder quelques petits plaisirs.

La serveuse du Bloody toute de vert vêtue réceptionna le bouquet avec un grand sourire.

Merci bien mdame ! D’habitude je préfère les fleurs, mais pour ce soir on va dire que les trèfles feront l’affaire ! Elle compta rapidement les végétaux et s’assura qu’il y avait bien le sacro-saint trèfle à 4 feuilles avant de glisser le tout sous le comptoir.

Bon, maintenant j’ai un défi à vous faire relever avant de vous donner la suite de l’aventure…
Elle dégaina alors une première pinte (0,6L), qu’elle remplit d’une première bière servie à la pression.
Une Draught… Puis une deuxième : Une Stout, une troisième, une Ale, et enfin une quatrième, une Lager.

Les 4 pintes fraichement tirées et dégoulinantes de mousses furent fièrement alignées sur le bar.
Vous devez me boire ça intégralement, pas question d’en perdre une goutte, ça serait un blasphème en ce jour de St. Patrick ! Pas la peine d’essayer de tricher, je vous surveille.

Nadja fut un peu déçue que le bouquet de trèfles ne fasse pas plus d'effet à la barmaid. Enfin, elle devait s'y attendre. Dommage, en plus elle était vraiment jolie, cette petite...

-Bon, maintenant j’ai un défi à vous faire relever avant de vous donner la suite de l’aventure…

Nadja releva les yeux. Un défi ? Ça ne l'effrayait pas. Si c'était une épreuve physique, elle se sentait capable de la réussir. Alors de quoi état-il question ? Courir un marathon ? Tuer un ours à mains nues ? Ou bien chercher des foutus pissenlits dans un foutu jardin publique ?
Nadja regarda la barmaid s'activer. à chaque pinte que la jeune femme rousse posait sur le comptoir, le sourire de la russe s'élargissait, et finalement elle ressemblait au chat de Cheshire quand elle entendit l'énoncé de l'épreuve.

-Vous devez me boire ça intégralement, pas question d’en perdre une goutte, ça serait un blasphème en ce jour de St. Patrick ! Pas la peine d’essayer de tricher, je vous surveille.
-Trrricher ? Chérrrie, tu ne sais pas à qui tu t'adrrresses ! De là, d'où je viens, on appelle ça de la grrrenadine !

Elle n'en revenait pas. Une épreuve où il fallait boire ! Alors là, elle venait d'oublier tout ce qu'elle avait pu dire de mal sur la culture irlandaise. à partir de cet instant, la Saint-Patrick était SA fête, devant la Saint-Grotus.

-Tu te sens d’attaque de vider les 4 ou bien on oublie un instant mon âge et je te file un coup de main ? En tout cas si jamais je pose une option sur la Ale, c’est ma préférée !

Sur le coup, Nadja avait presque oublié Winnifred. Elle ne s'attendait pas à ce que la gamine demande à participer. Mais après tout, se saouler la gueule, c'était aussi une affaire de jeunes, c'était même quelque chose qui rassemblait les générations.

-Mmmh... Y'a pas de prrroblème, Uchenik ! J'ai bien envie de tout m'enfiler à moi toute seule, mais ce serrra plus marrrant si tu bois aussi. De toutes façons je ne fais pas confiance à ceux qui ne boivent pas. Enfin...je ne fais pas plus confiance à ceux qui boivent. HAHAHAHAHAHAHA ! Parrr contrre, bois vite ou je m'en charrrge.

Nadja laissa donc la Ale à sa jeune camarade et se frotta les mains devant les trois autres pintes. Elle prit la première, la draugt, et la souleva. Elle trinqua avec Winnifred en lâchant un magnifique "Na Sdorovié !" avant de porter la pinte à ses lèvres. Elle but très vite, sans s'arrêter, et bruyamment. Puis lorsqu'il ne resta plus une goutte d'alcool dans le récipient de verre, elle le fracassa par terre et, le temps de reprendre son souffle, elle s'attaquait déjà à la suivante. Pas la moindre goutte ne fut épargnée. à peine une minute plus tard, Nadja affichait un sourire triomphal, les éclats des choppes éparpillés à ses rangers.

-Ben quoi ? C'était juste des choppes, pas de quoi en chier une pendule !