Binôme Winnie - Nadja

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Winnifred décida de ne pas se formaliser du fait que sa binôme était probablement une psychopathe fétichiste des armes à feu anciennes et la suivit dans la salle du bar. Elle la regarda ensuite échanger leur petit bouquet de trèfles contre une série de pintes de bières.

L’adolescente se doutait quelques peu qu’il y aurait une petite mousse quelque part au milieu du parcours, car on ne pouvait pas imaginer de St. Patrick digne de ce nom sans bière… D’ailleurs elle se souvenait que du temps où sa maman tenait un pub à Galway, la nuit de la St. Patrick laissait derrière elle un nombre impressionnant de cadavres de futs et que cela représentait leur meilleur chiffre d’affaire de l’année et de loin.

L a jeune fille connaissait donc plutôt bien ce domaine mais une part d’elle-même regrettait qu’on ne lui ait pas servi de whisky, son alcool préféré. Enfin, elle n’oubliait pas qu’elle était toujours mineure et qu’officiellement elle n’avait pas le droit d’en descendre la moindre goutte…

Tu te sens d’attaque de vider les 4 ou bien on oublie un instant mon âge et je te file un coup de main ? En tout cas si jamais je pose une option sur la Ale, c’est ma préférée ! Pas étonnant vu qu’il s’agissait de la plus sucrée des quatre.

Nadja fut un peu déçue que le bouquet de trèfles ne fasse pas plus d'effet à la barmaid. Enfin, elle devait s'y attendre. Dommage, en plus elle était vraiment jolie, cette petite...

-Bon, maintenant j’ai un défi à vous faire relever avant de vous donner la suite de l’aventure…

Nadja releva les yeux. Un défi ? Ça ne l'effrayait pas. Si c'était une épreuve physique, elle se sentait capable de la réussir. Alors de quoi état-il question ? Courir un marathon ? Tuer un ours à mains nues ? Ou bien chercher des foutus pissenlits dans un foutu jardin publique ?
Nadja regarda la barmaid s'activer. à chaque pinte que la jeune femme rousse posait sur le comptoir, le sourire de la russe s'élargissait, et finalement elle ressemblait au chat de Cheshire quand elle entendit l'énoncé de l'épreuve.

-Vous devez me boire ça intégralement, pas question d’en perdre une goutte, ça serait un blasphème en ce jour de St. Patrick ! Pas la peine d’essayer de tricher, je vous surveille.
-Trrricher ? Chérrrie, tu ne sais pas à qui tu t'adrrresses ! De là, d'où je viens, on appelle ça de la grrrenadine !

Elle n'en revenait pas. Une épreuve où il fallait boire ! Alors là, elle venait d'oublier tout ce qu'elle avait pu dire de mal sur la culture irlandaise. à partir de cet instant, la Saint-Patrick était SA fête, devant la Saint-Grotus.

-Tu te sens d’attaque de vider les 4 ou bien on oublie un instant mon âge et je te file un coup de main ? En tout cas si jamais je pose une option sur la Ale, c’est ma préférée !

Sur le coup, Nadja avait presque oublié Winnifred. Elle ne s'attendait pas à ce que la gamine demande à participer. Mais après tout, se saouler la gueule, c'était aussi une affaire de jeunes, c'était même quelque chose qui rassemblait les générations.

-Mmmh... Y'a pas de prrroblème, Uchenik ! J'ai bien envie de tout m'enfiler à moi toute seule, mais ce serrra plus marrrant si tu bois aussi. De toutes façons je ne fais pas confiance à ceux qui ne boivent pas. Enfin...je ne fais pas plus confiance à ceux qui boivent. HAHAHAHAHAHAHA ! Parrr contrre, bois vite ou je m'en charrrge.

Nadja laissa donc la Ale à sa jeune camarade et se frotta les mains devant les trois autres pintes. Elle prit la première, la draugt, et la souleva. Elle trinqua avec Winnifred en lâchant un magnifique "Na Sdorovié !" avant de porter la pinte à ses lèvres. Elle but très vite, sans s'arrêter, et bruyamment. Puis lorsqu'il ne resta plus une goutte d'alcool dans le récipient de verre, elle le fracassa par terre et, le temps de reprendre son souffle, elle s'attaquait déjà à la suivante. Pas la moindre goutte ne fut épargnée. à peine une minute plus tard, Nadja affichait un sourire triomphal, les éclats des choppes éparpillés à ses rangers.

-Ben quoi ? C'était juste des choppes, pas de quoi en chier une pendule !

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Winnifred s’installa au bar à côté de la russe et reluqua sa pinte avec une lueur gourmande dans le regard. Elle prit le temps de plonger ses lèvres dans la mousse bien fraîche, et à peine eut-elle le temps de lever les yeux qu’elle vit que sa binôme venait de vider sa première pinte. Intégralement. Avant de la fracasser par terre.

Wow, t’as une sacrée descente ! s’exclama la jeune fille, la bouche encore ourlée d’une moustache mousseuse qu’elle n’avait pas pris la peine d’essuyer. Par contre si tu pouvais éviter de casser la vaisselle ça serait cool, j’ai pas envie que la serveuse déguisée en Leprechaun nous passe un savon, j’ai passé l’âge de me faire enguirlander par un lutin !

Oui, une fille de bartender ne rigole jamais avec la vaisselle. Winnifred continua de descendre lentement sa Ale, mais à un rythme bien moins effréné que Nadja. Pour elle, descendre une pinte cul-sec reviendrait à coup sur à la rendre aussi vite qu’elle était rentrée.

Siouplait mdame, est-ce que je pourrais avoir des cacahuètes ou des chips ? Un truc salé à grignoter quoi, ce que vous avez, demanda-t-elle à la serveuse, parce que picoler tout seul c’était bien, mais picoler en mangeant un truc tout à fait gras et pas équilibré c’était encore meilleur.
La barmaid ramena rapidement un petit assortiment de cacahuètes, bretzel et olives à l’ail dans lequel l’adolescente piocha allègrement avant d’en proposer à sa coéquipière :

T’en veux ? Mais j’espère que tu manges moins que tu bois, sinon je vais finir la soirée ruinée !

Nadja s'essuya la bouche d'un revers de la main. N'importe qui à sa place aurait roulé sous la table ou serait en train de rendre sa bière, mais il en fallait bien plus pour enivrer cette russe qui carburait à la vodka frelatée depuis son enfance. En fait, elle avait bien envie de se commander autre chose à boire. Mais finalement, elle y renonça. Si elle se mettait à boire maintenant elle en avait encore pour la soirée, et ce n'était pas comme ça qu'elles arriveraient au bout du jeu de piste avant les autres concurrents.
De son côté, Winnifred buvait sa choppe, plus lentement que Nadja (à un rythme normal, quoi). Pour accompagner sa boisson, elle commanda des trucs à grignoter.

-T’en veux ? Mais j’espère que tu manges moins que tu bois, sinon je vais finir la soirée ruinée !

Nadja regarda la petite coupelle et piocha dedans quelques cacahuètes.

-T'inquiètes, Uchenik, Je peux tenirrr une semaine avec ces trrrois cacahuètes.

Du moins, elle avait appris à survivre avec le minimum de nourriture dans le Spetsnaz, mais dans la pratique quand elle avait une occasion de manger à sa faim elle ne se gênait jamais pour ripailler à s'en faire exploser la panse. C'est qu'il fallait bien la nourrir, son énorme carcasse, de même que la louve qu'elle abritait.

-Finis vite, quand même. Faut qu'on s'active un peu si on veut gagner le jeu.

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Plus le temps passait, et plus Winnifred avait l’impression que sa binôme était une espèce de psychopathe entraînée par le KGB comme on voyait dans les films. Elle piqua du nez dans sa coupelle de biscuits apéro tout en grignotant un bretzel dont le sel la motiverait pour boire plus vite.

Je fais ce que je peux, répondit-elle à la directive de sa camarade de jeu qui la pressait de boire plus vite. Mon estomac et ma vessie sont pas extensibles, d’ailleurs j’espère que la prochaine étape a des toilettes, je vais pas tarder à avoir besoin d’aller au petit coin !

L’adolescente avait déjà descendu les ¾ de sa bière, et fixa le quart restant dans le blanc de la mousse, faisant appel à toute son essence irlandaise et à l’esprit alcoolique de tous ses ancêtres qui coulait dans ses veines pour agripper la choppe à deux mains et glou, et glou, et glou, vider sa chope cul-sec avant de la reposer sur le bar, un sourire satisfait sur le visage.

Voilà, l’Uchenik a terminé sa part du contrat ! D’ailleurs ça veut dire quoi ce truc ?

Winnifred était curieuse, mais ce qui l'intriguait encore plus que la signification de ce surnom était le cadeau qu'elle pourrait gagner en arrivant première. A Galway, on n'était jamais vraiment sur de rien.

Nadja s'affairait avec le ramasse-poussière fourni par la barmaid, ramassant les éclats des choppes malchanceuses. Mais pourquoi le personnel de bar des pays occidentaux avaient-ils si peu d'égard pour les coutumes slaves ? Ce n'étaient que quelques choppes, ça se rachetait. Enfin, elle ramassa tout de même les débris, ne tenant pas à ce que la barmaid chipote à leur donner la suite des instructions à cause de ça.

-Je fais ce que je peux. Mon estomac et ma vessie sont pas extensibles, d’ailleurs j’espère que la prochaine étape a des toilettes, je vais pas tarder à avoir besoin d’aller au petit coin !

Nadja souffla, ramassant un éclat de verre qui avait roulé sous un tabouret.

-Il doit y en avoirrr ici. Tu ferras vite, tout de même.

Elle ramassa les derniers morceaux et rendit le tout à la barmaid. Dorénavant elle ne casserait son verre que pour trinquer avec quelqu'un, ce serait plus prudent.

-Voilà, l’Uchenik a terminé sa part du contrat ! D’ailleurs ça veut dire quoi ce truc ?

En effet, Winnifred avait enfin fini sa choppe, mais elle semblait prête à exploser. Nadja lui ébouriffa les cheveux en souriant.

-Ah, ça... Tu le saurrras peut-êtrrre un jourrr, et alorrrs tu ne le serrras plus tant que ça.

C'était son truc, à Nadja. Elle avait une assez mauvaise mémoire des noms, alors elle s'amusait à donner à chacune de ses connaissance un surnom tarabiscoté, dont elle était souvent la seule à connaître la signification. Et alors quand on lui posait la question elle jouait toujours le mystère.

-Alorrrs, beauté ? Je crrrois qu'on peut dirrre mission accomplie ! C'est quoi la suite des rrréjouissances ?

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La réponse de la fille de l'est lui fournit un gros indice : d’après ce qu’elle venait de lui dire, « Uchenik » devait signifier quelque chose comme « la bleue ». De toute façon, elle demanderait au traducteur de Google de lui donner le sens précis du terme, elle avait déjà vu qu’il y avait l’option russe dessus.

Winnifred attendit le verdict de la serveuse avec impatience, et apprit avec joie qu’elles approchaient de la fin de leur périple.
Cool, ça veut dire qu’on arrive bientôt à la ligne d’arrivée… Je vais aller larguer du lest en vitesse avant de partir !
Elle se rendit alors dans les toilettes pour dames du Bloody et fit ce qu’elle avait à faire dans un temps record, avant de venir se planter devant sa camarade :

Bon, ayé, je suis prête pour la suite ! On y va à pieds, c’est à même pas 5 minutes de marche, si on prend ton vieux tacot ça risque de nous ralentir, c’est toujours un enfer pour se garer à l’hôtel de ville.

L’adolescente se sentait toute excitée et affreusement curieuse de savoir ce qu’elle allait gagner. Elle espérait bien rafler le gros lot, mais cas échéant elle était sure qu’un lot de consolation l’attendrait, et elle se sentait comme du temps où elle tentait de gagner un cadeau à la pêche aux canards de la fête foraine : elle savait que ça serait soit un jouet pourri soit un poisson rouge qui ne terminerait pas la semaine, mais l’excitation du cadeau était là, belle et bien présente.

Winnifred alla vite fait aux toilettes, Nadja n'eut pas le temps de s'impatienter. Pendant ce temps mort, elle repensa en souriant à tous les souvenirs que lui évoquaient les toilettes des bars. Combien de mec avaient fini la tête dans la cuvette après l'avoir emmerdée ? Combien de fois elle-même s'était retrouvée la tête dans la cuvette quand elle avait vraiment trop bu ? Des souvenirs de chiotte, peut-être, mais en tout cas des souvenirs agréables et assez rafraîchissants entre tous les souvenirs douloureux récoltés dans son existence.

-Bon, ayé, je suis prête pour la suite ! On y va à pieds, c’est à même pas 5 minutes de marche, si on prend ton vieux tacot ça risque de nous ralentir, c’est toujours un enfer pour se garer à l’hôtel de ville.

Nadja faillit râler, jusqu'à ce que Winnifred parle du problème de parking. En effet, à quoi bon aller plus vite sur quelques centaines de mètres pour finalement ne pas réussir à se garer ?

-Ouais, pas faux. Allez, grrrouillons-nous !

Saluant la barmaid, Nadja prit sa jeune coéquipière par la main et sortit du Bloody Valentine. Dehors, elle se mit à courir, entraînant derrière elle l'adolescente. C'était un comportement assez puéril de sa part, surtout que pour un concours organisé par la municipalité, elles gagneraient au mieux un lecteur K7 fabriqué en Chine (même pas communiste, la Chine !). Mais elle avait besoin de remporter une victoire simple, ne serait-ce que pour se prouver à elle-même qu'elle savait faire autre chose que la guerre.

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Les ruelles

Winnie se fit soudainement agripper par sa binôme et avant d’avoir eu le temps de dire « ouf » elle se retrouvait trainée sur les trottoir à gambader à une cadence folle.

Heeeey, doucement, oublie pas que tu fais le double de ma taille – elle n’osa pas dire le double de mon poids, ça ne se faisait pas de dire ce genre de chose à une dame, quelle que soit la nature de la dame – et que moi j’ai des jambes de naine à côté !

Sur qu’avec une bonne quarantaine de centimètres en moins, la jeune fille avait du mal à tenir le rythme. Fort heureusement, l’hôtel de ville n’était qu’à deux rues du Bloody Valentine : après avoir descendu la St. Mary’s road, elles n’avaient plus qu’à prendre à gauche sur Taylor Hill le tour était joué.

Complètement essoufflée, les joues en feu et le cheveu en bataille, Winnifred réussit à se détacher de l’étreinte de la russe lorsqu’elles arrivèrent devant la ligne d'arrivée: la porte de l'hôtel de ville.
Tu… Permets… Je meurs et… Je te rejoins !

Elle fit signe à sa coéquipière de rentrer sans elle le temps qu’elle reprenne son souffle, penchée en avant, les avant-bras reposant sur ses cuisses. Elle ne voulait pas la ralentir et risquer de perdre la victoire pour si peu, mais d’un autre côté elle n’avait pas spécialement envie d’aller cracher ses poumons sur le tapis du gouverneur, ça n’aurait pas été du plus bel effet.

Le binôme progressa rapidement vers l'hôtel de ville, malgré Winnifred qui traînait en haletant comme une locomotive asthmatique. Nadja fut plusieurs fois sur le point de la prendre sur son épaule comme un sac à patates. Mais finalement, elle n'eut pas besoin d'en arriver à cette extrémité, puisqu'elles virent se profiler le grand bâtiment avec son drapeau irlandais. Elles montèrent les quelques marches et s'arrêtèrent un peu pour que Winnifred puisse reprendre son souffle.

-Tu… Permets… Je meurs et… Je te rejoins !
-Chochotte !

Même si en tant que lycanne elle avait forcément une forme physique hors du commun, Nadja ne trouvait pas normal qu'à 18 ans à peine Winnifred courre moins longtemps qu'elle, qui semblait en avoir quarante. Pour elle, le tout était une question d'entraînement. Enfin, elle devaient avoir une bonne avance sur les autres groupes, c'est pourquoi Nadja attendit patiemment que Winnie ait fini de cracher ses poumons.

-Tu devrrrais essayer la natation, Uchenik. C'est souverrrain pourrr stimuler les capacités pulmonairrres. Je crrrois que ça s'impose. De prrréférrrence, pas dans une piscine municipale, mieux vaut éviter les micrrrobes et les gamins qui pissent dans l'eau.

Nadja et les enfants...une véritable relation amour/haine... Enfin, quand Winnifred sembla en meilleure forme :

-Bon. Alorrrs on y va, maintenant ? Ce serrrait dommage de fairrre attendrrre môssieur le guverrrneurrr.

Prenant le premier signe de Winnifred pour une approbation, elle ouvrit les portes à la volée et marcha jusqu'au comptoir de l'accueil avant de brailler :

-BONJOURRR ! On vient voirrr sa majesté le gouverrrneurrr Gico...Gica...Jacko...le gouverrrneurrr, quoi ! C'est rrrapporrrt à la courrrse d'orrrientation !

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L'hôtel de ville

Winnifred jeta un regard fort peu amical à sa binôme. Non mais de quel droit l’armoire à glace bodybuildée se permettait-elle de lui donner des leçons ? Elle se sentait parfaitement à l’aise dans ses bourrelets et n’avait aucunement envie de ressembler à un tas de muscles tout secs.

Sans façons merci. Le chlore de la piscine fait virer le rose de mes cheveux au vert pelouse, c’est pas beau à voir… Ou quand un tragique cours de natation du temps où elle allait encore au lycée lui avait contraint de se couper les pointes à cause de la réaction hasardeuse entre son colorant capillaire et le chlore.

Une fois remise, elle suivit la russe à l’intérieur de l’hôtel de ville.

Heu… Sans vouloir te contrarier, c’est MADAME le gouverneur, Gianna Giacometti, c’est une fille !
La jeune fille alla demander aux dames de l’accueil le chemin qui les mènerait jusqu’au fameux bureau de la « gouverneuse », qui lui indiquèrent qu’il se situait à l’étage au fond du couloir de droite.

C’est parti ? demanda-t-elle à sa coéquipière, et t’avises pas de lui donner du monsieur, elle risquerait de pas vouloir nous donner nos cadeaux, à ce qu’on raconte elle est pas du genre commode !
En effet, certaines rumeurs comparant Melle Giacometti avec un iceberg circulaient, mais Winnifred n’y avait jamais prêté attention, car elle savait pertinemment que pour réussir à obtenir ce poste à Galway, mieux valait tenir de Margaret Thatcher que de Mère Teresa.

-Heu… Sans vouloir te contrarier, c’est MADAME le gouverneur, Gianna Giacometti, c’est une fille !

Nadja resta un instant immobile, les poings posés sur le comptoir, à toiser la dame de l'accueil sans rien dire.

-Ouais, mais en même temps comment je peux savoirrr ? On me dit jamais rrrien, à moi ! Frrranchement, quand on entend parrrler de gouverrrneurrr, on s'attend d'aborrrd à trrrouver un homme. Bon, occupe-toi de ça !

Nadja laissa Winnifred parler avec la réceptionniste, vu qu'elle connaissait mieux l'endroit et qu'elle savait mieux quoi dire. Enfin, comme ça elles apprirent que la gouverneure se trouvait à l'étage, au fond du couloir de droite.

-C’est parti ? Et t’avises pas de lui donner du monsieur, elle risquerait de pas vouloir nous donner nos cadeaux, à ce qu’on raconte elle est pas du genre commode !
-GNAGNAGNA ! De toutes façons, ces politiciens c'est tous des culs pincés. Ça les décoincerrrait un peu de parrrtager la vie des masses qu'ils gouverrrnent. Boirrre la même piquette, manger le même pain à base de sciurrre, et aller au frrront en même temps que nous quand ces cons choisissent de déclarrrer la guerrre ! ......Mouais, oublie ça, encorrre un frrree style de ma parrrt...

Quoi qu'il en soit, même si elle évitait de l'appeler monsieur, Nadja n'allait pas non plus faire des courbettes à la gouverneure. Elle avait l'habitude de dire bien haut ce qu'elle pensait, et faire de la neige aux puissants n'était pas dans sa nature. Alors elle avait intérêt à être polie, cette politicienne de village ! Nadja marcha jusqu'au bureau, Winnifred derrière elle, et frappa trois coups qui résonnèrent comme des coups de canon sur la porte en chêne.

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Malgré le fait que la St. Patrick soit un jour férié, Mlle le gouverneur était dans son bureau, traitant des dossiers en retard sur son ordinateur qu’elle utilisait grâce à sa tablette de lecture spéciale et son clavier en braille.

La chasse au trésor de la St. Patrick était son idée, une initiative qu’elle avait pris dans le but de développer la vie associative de Galway : toutes les autres villes avaient des clubs et des activités organisées par la communauté, et c’était pile ce qu’il manquait à Galway pour resserrer les liens entre les différentes populations.

Elle attendait donc tranquillement tous les tandems de participants pour les accueillir, mais pour le moment personne n’avait encore frappé à sa porte… Ce qui n’allait pas tarder à arriver, trois coups sonores retentirent dans le bureau, comme si on avait tenté de démolir sa porte à coup de bélier.

Entrez, je vous en prie ! lança-t-elle depuis son poste de travail. Elle ne comptait pas non plus passer sa soirée à faire portier en effectuant 50 aller-retours, les candidats ayant finalisé les différentes épreuves seraient certainement capables d’entrer tous seuls.

Lorsque les deux premiers candidats et grands vainqueurs de la chasse au trésor pénétrèrent dans son bureau, elle sentit immédiatement qu’il s’agissait de candidates d’origines mixtes : une lycane et une humaine. Si elles s’étaient suffisamment bien entendues pour arriver jusque là, c’est que son projet n’était peut-être finalement pas une mauvaise idée !

Bien le bonsoir mesdames, bienvenue à l’hôtel de ville et félicitations à vous, vous êtes les premières à arriver jusqu’à moi, ce qui signifie que vous venez de remporter la chasse au trésor ! Mais avant de parler des gains, parlez-moi un peu de vous, que je sache quelles vaillantes challengeuses ont remporté cette course…

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L’attitude de Nadja fit miroiter le pire à Winnifred : elle l’imaginait déjà en train de tenir son discours à peine orienté communiste devant la gouverneur et se faire déchiqueter sur place… L’adolescente pâlit, redoutant un carnage.

Cependant, la voix de la cheftaine de Galway retentit de l’autre côté de la porte, lui faisant immédiatement oublier ses inquiétudes en lui mettant dans l’esprit le résultat de la course. Avaient-elles gagné ?

Pénétrant timidement dans le bureau, la jeune fille attendit le verdict en baissant les yeux mais ne put s’empêcher de glapir un petit YES ! en entendant l’énoncé du verdict. Se tournant vers Nadja, elle s’exclama : On a gagné binôme, tape m’en cinq ! tout en lui tendant sa main.

Mme Giacometti leur demanda ensuite de parler d’elles, ce qui intimida quelques peu Winnifred, qui n’était au fond qu’une jeune fille timide pour qui prendre la parole devant un officiel se révélait être une épreuve un peu gênante, surtout qu'elle n'avait rien de bien extraordinaire à raconter.

Heu… Je m’appelle Winnifred Finnegan Mdame, j’ai 17 ans et je suis à la recherche d’un emploi depuis l’incendie du Zombillenium…
Je suis née à Galway et j’y vis quasiment depuis ma naissance, donc je connais la ville comme ma poche et la parcourir pour la course a été un vrai plaisir, même si je n’apprécie pas trop les bestioles de la ménagerie…

Elle ne voyait pas le mal à se la jouer première de la classe, après tout si elle avait besoin d’une secrétaire ou d'un larbin pour les photocopies et le café peut-être pourrait-elle lui proposer un emploi ?

Et puis surtout elle tenait vraiment à savoir quel était leur lot, et elle n’avait pas envie de froisser la gouverneur qui pouvait très bien refuser de leur donner.

-On a gagné binôme, tape m’en cinq !

Nadja en tapa cinq sans hésiter à Winnifred, en faisant attention toutefois de ne pas la mettre par terre. Elle était ravie d'avoir gagné, même si elle ignorait encore quoi. La satisfaction d'avoir accompli sa mission était toujours une récompense en soi. Après, c'était juste un jeu organisé par la municipalité, ce n'était pas comme si elle avait gagné à euromilion. Et c'était pour ça qu'elle n'était pas en train de courir partout en hurlant comme un supporter de foot en agitant les bras au lieu de sobrement se taper dans la main avec sa binôme.

-Je te l'avais dit, Uchenik ! T'es la tête et moi les muscles !

Par contre, elle fut un peu refroidie quand la gouverneure demanda à ce qu'elles en disent plus sur elles. Nadja n'aimait pas beaucoup raconter sa vie. Elle était toujours méfiante face à l'éventualité qu'on utilise ces connaissances contre elle. Enfin, se dit-elle en haussant ses grandes épaules, se faire connaître un peu plus devrait aider la population locale à l'accepter à Galway. Et puis Winnifred venait de se livrer (même si elle n'avait rien dit que Nadja n'ait deviné depuis leur rencontre).

-Nadja Radanova. Je saisais parrrtie du Spetsnaz avant que le KGB décide que je devais mourrrirrr. Une affairrre de secrrret d'état... Depuis, j'ai pas mal bourrrlingué dans le monde. J'essaie de trrrouver un entrrroit trrranquile pourrr planter mes choux et gagner ma crrroûte en faisant un trrravail honnête

Voilà. Pas besoin d'entrer plus dans les détails, elle en aurait pour des heures à raconter toute sa vie. En tout cas ça faisait encore un point commun entre Nadja et Winnifred : les deux étaient à la recherche d'un emploi après un licenciement quelque peu chaotique.

-Alorrrs ? Qu'est-ce qu'on a gagné, chef ?

Contrairement à Winnifred, l'ex-spetsnaz n'était pas du genre à tourner autour du pot.

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Une lycane qui semblait être un ex agent du KGB faisant équipe avec une petite adolescente irlandaise du coin… Voilà qui avait de quoi la réjouir, elle qui avait organisé la course dans le but de rapprocher les individus !

Mais l’heure n’était pas à la promotion de la diversité, elle sentait une sorte d’impatience chez les deux demoiselles, et pour cause, le suspense devait être insoutenable pour elles qui attendaient fébrilement de savoir ce qu’elles venaient de remporter.

Bien, mes chères Winnifred et Nadja, je ne vais pas vous faire languir plus longtemps, voici votre lot pour avoir remporté la chasse au trésor de la St. Patrick !

La gouverneur ouvrit un tiroir et en sortit deux petites choses qu’elle posa sur son bureau. En y regardant de plus près, on pouvait voir qu’il s’agissait de deux trèfles à quatre feuilles un peu flétris emprisonnés dans de la résine pleine de bulles et toute craquelée qui ne devait pas être de première jeunesse dans laquelle on avait fiché un petit anneau de métal.

Gianna garda le silence un instant afin de laisser aux gagnantes le temps de regarder leur lot avant de poursuivre :
Mesdames, ce pendentif qui ne paye peut-être pas de mine est d’une grande valeur ! Il s’agit d’un trèfle sacré bénit par St. Patrick en personne et qu’il distribuait à ses fidèles du temps où il était évêque au cours du Ve siècle, ce qui explique qu’on l’ait conservé dans de la résine pour maintenir son effet des plus précieux…

En effet, ce pendentif immunise celui qui le porte contre les effets toxiques des liquides qui entrent en contact avec son organisme, qu’il s’agisse d'alcool, de poison ou de venin… Adieu donc gueule de bois, douloureuses piqûres d’abeille et bien d’autres choses encore, mais un conseil, gardez-le précieusement, ce genre d’objet est de nos jours extrêmement prisé par les collectionneurs et autre fétichistes d’items sacrés car il en reste très peu dans le monde ! Vous pensez bien, les trèfles de plus de 1500 ans, ça ne court pas les rues…

La gouverneur avait l’air assez satisfaite de son cadeau, car elle avait du faire des pieds et des mains pour réussir à en dégoter deux. Mais à cœur vaillant rien d’impossible, elle avait donc réussi à faire jouer ses relations pour obtenir un lot digne de ce nom à offrir aux vainqueurs.

Descriptif de l’item pour le topic de recensement des objets particuliers ::

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Winnifred attendait fébrilement que la gouverneur annonce leur lot… Quelle ne fut pas sa surprise de découvrir un pendentif vieux et moche contenant un trèfle à 4 feuilles rabougri !

L’adolescente esquissa une moue de déception, pensant que si la municipalité était radine elle aurait pu au moins faire l’effort de faire importer un truc neuf de Chine… Jusqu’à qu’elle entende les propriétés de ce fameux pendentif, qui la laissèrent passablement dubitative. Ce truc là, un item sacré venant de St. Patrick himself ? Mouais, elle demandait à voir.

Donc si je porte ce machin je pourrais me descendre des litres de whisky sans jamais être malade, ni cirrhose ni rien ? Classe ça, mais va falloir que je le planque, sinon je vais me faire détrousser par le premier pochetron venu ! Mais vous êtes sûre que ça fonctionne vraiment ? Ce que vous nous avez raconté c’est juste une légende ou bien ça marche pour de vrai ?

Elle ne savait que penser, d’un côté elle avait bien envie de tester mais la perspective de passer une nuit au-dessus d’une cuvette en cas d’échec la tentait moyennement, et elle doutait que Wikipédia puisse lui apporter une réponse satisfaisante sur le sujet.

Nadja regarda la gouverneure poser deux pendentifs sur le bureau, d'abord dubitative. Ouais, ils étaient jolis, et ensuite ? Nadja ne s'attendait pas à un truc en plastique "made in China" dans une ville comme Galway, mais elle pensait recevoir quelque chose de plus utile qu'un pendentif qui finirait dans sa boîte à trophées.

-Mesdames, ce pendentif qui ne paye peut-être pas de mine est d’une grande valeur ! Il s’agit d’un trèfle sacré bénit par St. Patrick en personne et qu’il distribuait à ses fidèles du temps où il était évêque au cours du Ve siècle, ce qui explique qu’on l’ait conservé dans de la résine pour maintenir son effet des plus précieux... En effet, ce pendentif immunise celui qui le porte contre les effets toxiques des liquides qui entrent en contact avec son organisme, qu’il s’agisse d'alcool, de poison ou de venin… Adieu donc gueule de bois, douloureuses piqûres d’abeille et bien d’autres choses encore, mais un conseil, gardez-le précieusement, ce genre d’objet est de nos jours extrêmement prisé par les collectionneurs et autre fétichistes d’items sacrés car il en reste très peu dans le monde ! Vous pensez bien, les trèfles de plus de 1500 ans, ça ne court pas les rues…

Les deux participantes prirent leurs lots. Nadja examina le sien, son visage s'illumina petit à petit.

-Donc si je porte ce machin je pourrais me descendre des litres de whisky sans jamais être malade, ni cirrhose ni rien ? Classe ça, mais va falloir que je le planque, sinon je vais me faire détrousser par le premier pochetron venu ! Mais vous êtes sûre que ça fonctionne vraiment ? Ce que vous nous avez raconté c’est juste une légende ou bien ça marche pour de vrai ?
-MAIS C'EST GÉNIAL ! Ça veut dirrre que je vais pouvoirrr boirrre trrrois fois plus ! Je vais pouvoirrr m'enfiler des bouteilles de vodka, des tonneaux de vin, des citerrrnes entièrrres de sangrrria ! Merrrci, chef !

Disant cela, elle souleva Winnifred du sol et la serra dans ses bras à lui faire jaillir les yeux des orbites. Elle fit quelques tours sur elle-même avant de la reposer par terre en plus ou moins bon état.

-Un trrruc comme ça, ça s'arrrose ! Allez, je te paie un verrre ! J'suis sûrrre que tu connais plein d'endrrroits sympas dans le coin. Allez ! C'est parrrti ! A nous le pinarrrd !

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L’énoncé des pouvoirs du pendentif fit littéralement sauter Nadja de joie, et lorsque la binôme bodybuildée se jeta sur elle, Winnifred redouta que sa dernière heure ne soit venue, toute écrasée qu’elle était entre les bras de la blonde à la forte musculature, ne parvenant pas à reprendre son souffle.

Heureusement, elle fut reposée assez rapidement au sol pour ne pas suffoquer, ce qui ne l’empêcha pas de tousser comme une malheureuse.
Gosh… T’as le câlin plus… Musclé que celui de mon oncle Aidan… Faudrait y aller mollo sur la glonflette ! lança-t-elle comme elle pouvait tout en reprenant son souffle.

L’adolescente enveloppa précieusement son pendentif au beau milieu d’un paquet de Kleenex qui trainait dans son sac pour le protéger de toutes les babioles qui y trainaient, puis revint vers Mme la gouverneur : En tout cas je vous remercie beaucoup madame, c’est un très joli cadeau que vous nous faites, et qui est plutôt original, même si je ne m’attendais pas en tant que mineure à recevoir un article qui m’incite à la boisson! se risqua-t-elle à plaisanter avec la dame rousse avant de se retourner vers sa coéquipière:

Je veux bien aller fêter ça autour d’un verre mais sans alcool, si ma tante sent que j’ai picolé comme un trou en rentrant à la maison ça ne va plus être la St.Patrick mais la St.Winnifred !

Nadja était ravie de son cadeau. Bon, en y réfléchissant il était vrai qu'elle n'avait pas véritablement besoin d'un objet comme celui-là, ayant déjà une résistance à l'alcool infiniment plus élevée que celle de l'humain moyen. Mais même si elle avait l'habitude de la gueule de bois, ça ne lui ferait pas de mal de se réveiller fraîche comme une rose au lendemain d'une beuverie. Et si en plus ça lui permettait de résister aux divers poisons, c'était parfait ! Nadja avait pris l'habitude de ne jamais accepter de nourriture de la part de quelqu'un en qui elle n'avait pas une totale confiance, de crainte qu'on cherche à l'empoisonner ou simplement à la droguer pour abuser d'elle. Mais la possession d'un tel objet réglait le problème. Pour sûr, ça foutrait sacrément les chocotte aux ennemis de Nadja de voir l'énorme soviétique vider verre empoisonné sur verre empoisonné sans en souffrir, telle Grigori Raspoutine refusant obstinément de mourir face aux assauts multiples des conspirateurs...

-Je veux bien aller fêter ça autour d’un verre mais sans alcool, si ma tante sent que j’ai picolé comme un trou en rentrant à la maison ça ne va plus être la St.Patrick mais la St.Winnifred !

Nadja haussa les épaules.

-J'y vois aucun prrroblème, Uchenik. Je vais me payer un tonneau entier de grrros rrrouge qui tache et qui donne mal à la tête, et pourrr toi, une grrrenadine ou un coca. J'espèrrre juste que tu sais où on peut trrrouver tout ça. Alorrrs c'est parrrti ! Et encorrre merrrci, chef !