Toute en rondeur, elle a ces courbes généreuses des femmes qui savent profiter de tous les plaisirs que la vie peut offrir. De petite taille, elle garde tout de même une silhouette, très agréable à regarder et dont les proportions sont bien souvent avantageusement mises en valeur. Sa peau d'un blanc presque laiteux n'est couverte d'aucune marque, aucun tatouage, aucune cicatrice visible et elle semble en prendre un soin tout particulier, paniquant au moindre coup, à la moindre éraflure qui pourrait laisser une trace.

Adepte de tenues légères plus colorées les unes que les autres, on pourrait la croire daltonienne tant les couleurs ne s'accordent pas entre elles. Mais ce qui importe le plus c'est d'arborer fièrement toutes ces teintes joyeuses et donc de se faire remarquer. C'est ainsi qu'on pourra la croiser parfois vétue d'un corset jaune vif et d'une jupe violette sans qu'elle soit gênée le moins du monde.

Son visage quant à lui n'échappe pas à sa passion pour les couleurs vives. Vous ne la verrez jamais ou presque sans fard ni artifice, ses lèvres pulpeuses toujours peintes d'un charmant rouge vermillon. Ses yeux pétillant de malice sont eux aussi maquillés sans la moindre discrétion et elle semble mettre un point d'honneur à ne pas les assortir au reste de sa tenue. Pourtant, loin de la faire passer pour un clown, cet amas de couleurs lui donne un charme certain et met en valeur sa beauté, laissant parfois transparaitre involontairement sa jeunesse et ses traits fins.

Elle se déplace avec aisance et souplesse dans la foule, ne se laissant jamais dévier de sa route, comme si les lieux lui appartenaient ou qu'elle était sur une scène, sa longue chevelure bouclée, dont la couleur varie au gré de ses humeurs, retombant en mèches folles en cascade dans son dos.

Les rares personnes ayant pu la voir sans aucun maquillage (et ils se comptent sur les doigts d'une main) auront pu voir qu'elle a une cicatrice de la taille d'une main sur le ventre, vestige d'une vieille opération, qu'elle camoufle toujours avec de la poudre ou tout autre produit miracle effaçant les moindres défauts.

Joyeuse, extravertie, exubérante... autant d'adjectifs qui lui collent parfaitement à la peau. Vous la verrez sans cesse s'enthousiasmer sur le moindre évènement, sur la moindre découverte et prête à faire la fête et à prendre du bon temps.

Pourtant, en vraie femme-enfant, elle peut s'avérer boudeuse et piquer des colères mémorables lorsqu'elle se sent trop contrariée, ce qui peut arriver assez rapidement en fonction de son humeur du jour. S'ennuyant à la vitesse de l'éclair, il lui faut varier les activités et les loisirs. Sa capacité d'attention diminuant fortement à mesure que le temps passe, il lui faudra faire preuve d'une concentration extrème pour parvenir au bout de certaines actions entreprises.

Très gourmande, elle saura apprécier aussi bien un sandwich mangé sur le pouce qu'un diner dans un restaurant de luxe, même si le premier est malheureusement bien plus fréquent que les seconds. Mais que voulez vous, abondance de chair ne nuit pas et elle ne fera pas la fine bouche, surtout si c'est proposé avec le sourire.

Lorsqu'on l'interroge sur le monde qui l'entoure, elle ne semble pas réellement avoir d'opinion tranchée sur le moindre sujet, se contentant de se ranger à l'avis général et se désintéressant des grands évènements pour parler des dernières couleurs à la mode cet hiver. Certains pourraient la penser superficielle... ils auraient parfaitement raison.

"Moi quand ze serais grande, ze serais actrice à Hollywood !"
Cette phrase, qu'elle aurait aimé prophétique, Emilie l'a prononcé un nombre de fois incalculables, même une fois ayant arrêté de zozoter.

Elle rêvait de monter sur les planches, d'aller à Broadway et de conquérir ensuite le monde du cinéma. Cette petite fille un peu boulotte passait le plus clair de son temps sur une petite estrade improvisée dans le salon de sa mère, à Belfast, tandis que ses frères et soeurs la regardaient d'un air suspicieux. Il faut dire qu'avec une mère célibataire et grandissant dans l'un des quartiers les plus mal famés de la ville, ses rêves de gloire s'approchaient bien plus de la chimère que d'une issue possible pour cette gamine à couettes dont les performances scolaires ne volaient guère plus haut qu'un parterre de pâquerettes.

Malgré tout, après avoir successivement abandonné les cours de claquettes, de danse classique, de jonglage, de danse de salon et un tas d'autres activités que sa mère ne lui offrait qu'au prix d'éreintantes heures supplémentaires, la jeune Emilie se décida enfin.
Elle irait seule conquérir le monde de la scène quel qu'en soit le prix à payer. Et au diable sa mère qui avait finalement décidé de l'envoyer faire des études d'esthéticienne parce que "les conneries ça va bien 5 minutes mais faut penser à nourrir tout ce petit monde ma fille". Si personne ne voyait l'étendue de son talent ici, et bien c'est ailleurs qu'elle irait leur montrer à quel point elle était douée, avec ou sans cours d'harmonica.

A peine âgée de 16 ans, son baluchon sous le bras, elle se rendit à Dublin, essayant tant bien que mal de survivre en jouant dans des pièces minables des rôles qui ne lui permettraient jamais de percer et d'être enfin dans la lumière. Pourtant, elle avait un talent certain pour faire rire et pour captiver l'attention lorsqu'elle s'en donnait la peine. Jonglant d'un petit boulot sordide à un autre sans jamais trouver la volonté ou l'envie de faire ce qu'il fallait pour le garder, elle finit pourtant par décréter que la ville l'agaçait et elle décida d'honorer Galway de sa présence... ville aussi réputée pour ses studios de cinéma que pour sa température tropicale.

Mais Galway l'attirait, une troupe de théâtre renommée y restait pour un certain temps et elle était bien décidée à leur prouver qu'elle leur serait indispensable. Ayant trouvé une nouvelle fois un poste de serveur dans un bar un peu moins miteux que les autres, où elle servait abondance de bière éventée, sans la moindre difficulté -il faut dire que son physique des plus généreux était un atout de choc pour les consommateurs - elle finit par trouver d'autres aspects positifs à son emploi et à multiplier les avantages en nature pour les clients qui lui laissaient un généreux pourboire.

A mesure que les semaines passaient, la troupe était partie depuis longtemps sans qu'elle ait réussi ne serait-ce qu'à les apercevoir, elle finit par s'apercevoir qu'outre le fait que ses passes lui rapportaient bien plus que son emploi originel, elles n'étaient après tout, pas si désagréables. Elle devait jouer un rôle, ses clients avaient tendance à la gâter, à la flatter voire à l'aduler dans le meilleur des cas. Encore mieux qu'une star. Et puis... le travail n'était pas déplaisant, elle mettait souvent du coeur à l'ouvrage.

C'est ainsi qu'elle finit par délaisser complètement son emploi et à se faire une petite renommée dans le quartier... avant d'être repérée par Llylewin qui lui fit comprendre qu'elle était en mesure de viser bien plus haut et de briller, non pas sous les feux des projecteurs mais grâce aux diamants qu'elle pourrait se payer. Convaincue par son argumentaire en béton, elle rejoignit la maison close de Llylewin avec entrain et bonne humeur, trouvant enfin un nom de scène qui lui semblait approprié. Désormais, elle serait Milicent... C'est sans regret qu'elle dit adieu pour de bon à la petite Emilie et à ses couettes folles.

Après tout, l'important c'était de briller, peut importe les moyens non ? Elle continuerait de jouer la comédie, à s'amuser et à profiter de la vie... que demander de plus ?
Et puis, elle pourrait toujours devenir actrice pour de bon... plus tard.